Cela aurait du être des vacances de rêve, 5 semaines, je ne m’étais jamais autant arrêté depuis que je travaille. Je rêvais de calme, de nature, de solitude, d’oubli de soi, d’insouciance... La réalité fut tout autre... malheureusement. J’ai malgré tout réussi de belles choses, tout n’est donc pas si noir en cette fin d’été, mais le moral n’est pas au meilleur niveau.
Jeudi 14 et vendredi 15 Juillet :
Début des vacances ! Au programme, 6 à 7 jours dans le massif du Balaïtous, d’abord pour encadrer une sortie du Club Alpin de Toulouse, puis ensuite si les conditions le permettent, l’enchainement des arêtes du Balaïtous entre amis avec bivouac au sommet ! Malheureusement pour moi, mon cœur montrera ses premiers signes de faiblesse dès les premiers mètres de la montée au refuge du Larribet... Palpitations, fatigue, chaque pas est une corvée, le poids excessif du sac et la chaleur estivales n’aidant pas non plus. Je parviendrais malgré tout à me trainer jusqu’au refuge mais la forme n’est pas là et avec les palpitations, les doutes, la déprime et la peur font leur retour. Pas d’escalade le lendemain pour moi, je me lève tard les copains sont déjà partis sur l’ascension du Palas ou du Pic d’Artouste. Je pars tester ma forme vers les Lacs de Batcrabère au dessus du refuge. La réponse ne se fait pas attendre, dès les premiers pas hors du refuge, retour des palpitations... J’atteins néanmoins les lacs ou je tente de me reposer en vain... Vers 15h de retour au refuge je décide d’arrêter là, je redescends seul à la voiture, le cœur gros, les larmes aux yeux, je n’imaginais pas un début de vacance comme cela...
Jeudi 14 et vendredi 15 Juillet :
Début des vacances ! Au programme, 6 à 7 jours dans le massif du Balaïtous, d’abord pour encadrer une sortie du Club Alpin de Toulouse, puis ensuite si les conditions le permettent, l’enchainement des arêtes du Balaïtous entre amis avec bivouac au sommet ! Malheureusement pour moi, mon cœur montrera ses premiers signes de faiblesse dès les premiers mètres de la montée au refuge du Larribet... Palpitations, fatigue, chaque pas est une corvée, le poids excessif du sac et la chaleur estivales n’aidant pas non plus. Je parviendrais malgré tout à me trainer jusqu’au refuge mais la forme n’est pas là et avec les palpitations, les doutes, la déprime et la peur font leur retour. Pas d’escalade le lendemain pour moi, je me lève tard les copains sont déjà partis sur l’ascension du Palas ou du Pic d’Artouste. Je pars tester ma forme vers les Lacs de Batcrabère au dessus du refuge. La réponse ne se fait pas attendre, dès les premiers pas hors du refuge, retour des palpitations... J’atteins néanmoins les lacs ou je tente de me reposer en vain... Vers 15h de retour au refuge je décide d’arrêter là, je redescends seul à la voiture, le cœur gros, les larmes aux yeux, je n’imaginais pas un début de vacance comme cela...
Jeudi 28 Juillet :
Après un repos forcé à Mazamet, et après multiples tergiversations, analyses et autre rendez-vous médicaux me voici de retour en montagne. L’idée originale était d’enchainer plusieurs ascensions en solo et en autonomie en partant du Pic du Midi d’Ossau jusqu’au Mont Perdu. Parcours que j’avais imaginé et méticuleusement préparé plusieurs mois auparavant. Mais c’est sur un parcours amputé de moitié que je me lance aujourd’hui la forme n’étant pas là... Après une nuit courte mais relativement bonne sur le parking du Lac de Bious Artigue (pas bien c’est interdit), je démarre la montée vers le Col de Suzon vers 8h30. Il fait grand beau, la nature est resplendissante et encore accueillante à ses altitudes modeste. Je profite de la fraicheur matinale pour me mettre en jambe, la forme n’est pas si mauvaise malgré quelques palpitations, stressantes mais pas handicapantes comme il y’a deux semaines en montant au Larribet. Je poursuis donc et atteins rapidement le col de Suzon vers 10h30. Après un ravitaillement en eau et un dépôt de matériel et de nourriture, c’est allégé que m’engage dans l’ascension du Pic du Midi d’Ossau aux alentours de midi. Je franchi les cheminées faciles (pas d’escalade de 3 maximum, mais assez vertigineuses), double plusieurs cordées, me trompe dans la dernière cheminée mais sans conséquences et atteins le sommet vers 13h30. L’escalade en solo a au moins le mérité d’être rapide... Je n’ai plus qu’à consacrer ma fin de journée au repos, ayant prévu ce soir de dormir au sommet du Pic du Midi d’Ossau ! Je peux enfin me détendre et profiter : contemplation, dessin, photo, montage d’un Cairn sommital digne de ce nom, méditation, installation du bivouac rempliront ma fin de journée, le tout rythmé par l’échange de quelques mots avec les multiples grimpeurs de l’Ossau ce jour. Les derniers passeront vers 18h00 pour enfin laisser place au calme profond, perché là haut à 2884m d’altitude, je vis l’un des plus beaux couché de soleil et moment en montagne de ma vie.
Après un repos forcé à Mazamet, et après multiples tergiversations, analyses et autre rendez-vous médicaux me voici de retour en montagne. L’idée originale était d’enchainer plusieurs ascensions en solo et en autonomie en partant du Pic du Midi d’Ossau jusqu’au Mont Perdu. Parcours que j’avais imaginé et méticuleusement préparé plusieurs mois auparavant. Mais c’est sur un parcours amputé de moitié que je me lance aujourd’hui la forme n’étant pas là... Après une nuit courte mais relativement bonne sur le parking du Lac de Bious Artigue (pas bien c’est interdit), je démarre la montée vers le Col de Suzon vers 8h30. Il fait grand beau, la nature est resplendissante et encore accueillante à ses altitudes modeste. Je profite de la fraicheur matinale pour me mettre en jambe, la forme n’est pas si mauvaise malgré quelques palpitations, stressantes mais pas handicapantes comme il y’a deux semaines en montant au Larribet. Je poursuis donc et atteins rapidement le col de Suzon vers 10h30. Après un ravitaillement en eau et un dépôt de matériel et de nourriture, c’est allégé que m’engage dans l’ascension du Pic du Midi d’Ossau aux alentours de midi. Je franchi les cheminées faciles (pas d’escalade de 3 maximum, mais assez vertigineuses), double plusieurs cordées, me trompe dans la dernière cheminée mais sans conséquences et atteins le sommet vers 13h30. L’escalade en solo a au moins le mérité d’être rapide... Je n’ai plus qu’à consacrer ma fin de journée au repos, ayant prévu ce soir de dormir au sommet du Pic du Midi d’Ossau ! Je peux enfin me détendre et profiter : contemplation, dessin, photo, montage d’un Cairn sommital digne de ce nom, méditation, installation du bivouac rempliront ma fin de journée, le tout rythmé par l’échange de quelques mots avec les multiples grimpeurs de l’Ossau ce jour. Les derniers passeront vers 18h00 pour enfin laisser place au calme profond, perché là haut à 2884m d’altitude, je vis l’un des plus beaux couché de soleil et moment en montagne de ma vie.
Vendredi 29 Juillet :
Après un magnifique bivouac au sommet de l’Ossau, la journée suivante fut plus difficile... Beaucoup d’imprévus, pas mal de fatigue, problèmes avec le matériel, chaleur écrasante, averses, et retour des doutes.
La journée à commencé relativement tard ce matin, sortie du duvet vers 7h30 à peine, j’ai raté le levé du soleil mais il fallait bien se reposer un peu... J’ai tout de même profité d’une belle vue matinale, sous les yeux d’une Hermine visiblement hôte des lieux ! Quelques mots échangés avec les premiers (matinaux) à atteindre le sommet aujourd’hui et me voilà engagé dans la redescente. La corde restera dans le sac et les 3 cheminées dés-escaladées sans difficultés. Je me retrouve ainsi à 10h30 au col de Suzon soit très exactement 24h après l’avoir atteins une première fois. Je récupère : crampons, piolet, puis nourriture et commence mon chemin vers le refuge de Pombie ou j’ai prévu de faire le plein d’eau. La chaleur est déjà écrasante sous un ciel lourd et voilé, je redoute la suite de la journée. Quelques péripéties avec ma poche à eau, puis repas de midi, il est 13h et je suis encore au pied de l’Ossau ! Je repars sous un soleil de plomb comme j’en ai rarement connu en montagne. A mon esprit trottent les mots : cuisson, dessécher, déshydraté, sec, lourd, sueur, soif, désert, brulure, rôtissoire, four.... Je gagne enfin la forêt, la descente ayant au moins l’avantage de nous ramener sous des altitudes certes plus chaudes mais plus humaines... Je respire à nouveau, mais ce ne sera qu’un court répit ! Le fond de vallée et la traversée de la route du col du Pourtalet sont une véritable fournaise : les 150 premiers mètres de dénivelés ascendants qui doivent me ramener aux pieds du Pic Palas sont en plein soleil ! L’idée d’abandon traverse mon esprit, la route est a portée de main, et plusieurs fois je m’imagine à l’ombre faisant du stop pour revenir à Bious Artigue ou j’ai laissé la voiture... Mais la vue de la forêt 100 mètres plus haut et son ombre réparatrice me redonne du courage. Je poursuis. Je marche ainsi à l’ombre près de 30 minutes et m’arête au moment de traverser le torrent, là ou la forêt fait place aux pâturages. Pas question de poursuivre sous cette chaleur. Je profite donc de la fraicheur du torrent et de l’ombre des hêtres pour faire une longue pause. Je repars 1h après, entre temps le ciel s’est couvert... il fait heureusement un petit peu moins chaud. La montée est rude, je songe à nouveau à l’abandon, mais mon cœur ne va pas si mal et l’objectif se rapproche. Je trouve les ressources intérieures nécessaires pour poursuivre, mais c’est dur autant physiquement que mentalement : la dernière fois que je suis passé ici c’était avec Camille il y’a déjà 7 ans... Une averse me stoppe brusquement sous le col d’Arrious, c’est encore loin de l’objectif mais la pluie me fait prendre une décision rapide : bivouac ! En à peine 5~10 minutes je monte mon abri constitué d’une bâche érigée en forme de tente par mon piolet et un bâton de marche le tout maintenu par quelques sardines et cordelettes... Je me retrouve ainsi, assis en tailleur sous ma bâche à regarder la pluie tomber, sacré contraste avec le début de journée ! Les minutes passent, la pluie redouble d’abord avant de se calmer et de laisser à nouveau place au soleil. Il est 17h30, le ciel est dégagé, là encore décision rapide : je repars ! Je plie le camp et me remet en route, le Lac d’Arrémoulit est atteint vers 19h, il est temps de se reposer, je verrai bien demain !
Après un magnifique bivouac au sommet de l’Ossau, la journée suivante fut plus difficile... Beaucoup d’imprévus, pas mal de fatigue, problèmes avec le matériel, chaleur écrasante, averses, et retour des doutes.
La journée à commencé relativement tard ce matin, sortie du duvet vers 7h30 à peine, j’ai raté le levé du soleil mais il fallait bien se reposer un peu... J’ai tout de même profité d’une belle vue matinale, sous les yeux d’une Hermine visiblement hôte des lieux ! Quelques mots échangés avec les premiers (matinaux) à atteindre le sommet aujourd’hui et me voilà engagé dans la redescente. La corde restera dans le sac et les 3 cheminées dés-escaladées sans difficultés. Je me retrouve ainsi à 10h30 au col de Suzon soit très exactement 24h après l’avoir atteins une première fois. Je récupère : crampons, piolet, puis nourriture et commence mon chemin vers le refuge de Pombie ou j’ai prévu de faire le plein d’eau. La chaleur est déjà écrasante sous un ciel lourd et voilé, je redoute la suite de la journée. Quelques péripéties avec ma poche à eau, puis repas de midi, il est 13h et je suis encore au pied de l’Ossau ! Je repars sous un soleil de plomb comme j’en ai rarement connu en montagne. A mon esprit trottent les mots : cuisson, dessécher, déshydraté, sec, lourd, sueur, soif, désert, brulure, rôtissoire, four.... Je gagne enfin la forêt, la descente ayant au moins l’avantage de nous ramener sous des altitudes certes plus chaudes mais plus humaines... Je respire à nouveau, mais ce ne sera qu’un court répit ! Le fond de vallée et la traversée de la route du col du Pourtalet sont une véritable fournaise : les 150 premiers mètres de dénivelés ascendants qui doivent me ramener aux pieds du Pic Palas sont en plein soleil ! L’idée d’abandon traverse mon esprit, la route est a portée de main, et plusieurs fois je m’imagine à l’ombre faisant du stop pour revenir à Bious Artigue ou j’ai laissé la voiture... Mais la vue de la forêt 100 mètres plus haut et son ombre réparatrice me redonne du courage. Je poursuis. Je marche ainsi à l’ombre près de 30 minutes et m’arête au moment de traverser le torrent, là ou la forêt fait place aux pâturages. Pas question de poursuivre sous cette chaleur. Je profite donc de la fraicheur du torrent et de l’ombre des hêtres pour faire une longue pause. Je repars 1h après, entre temps le ciel s’est couvert... il fait heureusement un petit peu moins chaud. La montée est rude, je songe à nouveau à l’abandon, mais mon cœur ne va pas si mal et l’objectif se rapproche. Je trouve les ressources intérieures nécessaires pour poursuivre, mais c’est dur autant physiquement que mentalement : la dernière fois que je suis passé ici c’était avec Camille il y’a déjà 7 ans... Une averse me stoppe brusquement sous le col d’Arrious, c’est encore loin de l’objectif mais la pluie me fait prendre une décision rapide : bivouac ! En à peine 5~10 minutes je monte mon abri constitué d’une bâche érigée en forme de tente par mon piolet et un bâton de marche le tout maintenu par quelques sardines et cordelettes... Je me retrouve ainsi, assis en tailleur sous ma bâche à regarder la pluie tomber, sacré contraste avec le début de journée ! Les minutes passent, la pluie redouble d’abord avant de se calmer et de laisser à nouveau place au soleil. Il est 17h30, le ciel est dégagé, là encore décision rapide : je repars ! Je plie le camp et me remet en route, le Lac d’Arrémoulit est atteint vers 19h, il est temps de se reposer, je verrai bien demain !
Samedi 30 Juillet :
6h40, je me réveille dans une forme très moyenne. Le vent, et surtout le stress généré par mes arythmies m’ont fait passer une piètre nuit... Plus je stresse moins je dors, plus mon ryhtme cardiaque est perturbé et plus je stresse... Cercle infernal qui dure depuis un moi maintenant et dont je ne vois toujours pas l’issue. Alors machinalement, tel un robot je fais les gestes du quotidien d’un marcheur solitaire. D’abord sortir du duvet à moitié, pour enfiler une doudoune, puis les jambes pour mettre le pantalon qui servait d’oreiller, récupérer les chaussettes qui ont séché au fond du duvet, les mettre, et enfin passer les chaussures. Puis corvée d’eau, elle n’est pas loin et elle est potable aujourd’hui, puis la faire chauffer, mélanger au succulent muesli lyophilisé, préparer du thé, plier l’abris, le duvet, le matelas et déjeuner. Petite vaisselle, replier le réchaud, ranger les poubelles et enfin faire le sac. Plus d’une heure s’est écoulée, je suis décidément plus lent en étant seul, ou est-ce la peur d’affronter une vérité que je ne veux pas voir ? Je démarre donc la montée vers le col d’Arrémoulit vers 8h. Le pas est lent, un peu gauche... j’ai l’impression que ce n’est pas moi qui marche. Quelques arythmies à chaque pauses mais finalement assez peu voire pas du tout en plein effort comme il y’a deux semaines. Je continue, le col est atteint peu avant 9h, je vais devoir prendre une décision. Derrière moi le confort, la facilité, et surtout la sécurité. Devant moi l’intimidant versant ouest du Balaïtous développement pas moins de 1000m, des rochers abrupts, des torrents, de la neige, pas de sentier très marqué, l’inconnu, un fabuleux terrain de jeux en temps normal, mais aujourd’hui c’est la peur qui domine. M’y engager signifierait dans un premier temps descendre 400m plus bas au Lac d’Ariel pour dans un second temps grimper cet imposant versant ouest. Je compte les échappatoires possibles et je me rends à l’évidence, s’engager seul dans ces conditions n’est pas raisonnable. Comme il y’a deux semaines, je pleure au pied du Balaïtous. Comme il y’a deux semaines je m’interroge sur l’avenir... Vers 10h je me remets en route, les larmes reprennent lorsque je tourne le dos au Balaïtous, je marche tel un robot, gagné par la tristesse et les doutes, mes pieds heurtent les rochers, je zigzague. Puis peu à peu je digère, je pense aux prochains jours, je projette mentalement des escalades moins rude (physiquement) au Caroux pour retrouver le moral... Puis je descends vers le Lac d’Artouste jusqu’ici inconnu à mes yeux, le plaisir de l’exploration de terres inconnues (à mes yeux évidement) offrant une légère consolation à ce périple entrain de s’achever, déjà. Je gagne ainsi la gare du train le plus haut d’Europe (c’est ce qu’ils disent sur les publicités) : le petit train d’Artouste qui me ramène à la station de ski éponyme, puis télécabine, stop (2 fois des Bretons !) et me voici de retour au lac de Bious Artigue. Fin d’un périple à peine commencé, j’espère pouvoir le reprendre là ou je l’ai laissé très vite...
6h40, je me réveille dans une forme très moyenne. Le vent, et surtout le stress généré par mes arythmies m’ont fait passer une piètre nuit... Plus je stresse moins je dors, plus mon ryhtme cardiaque est perturbé et plus je stresse... Cercle infernal qui dure depuis un moi maintenant et dont je ne vois toujours pas l’issue. Alors machinalement, tel un robot je fais les gestes du quotidien d’un marcheur solitaire. D’abord sortir du duvet à moitié, pour enfiler une doudoune, puis les jambes pour mettre le pantalon qui servait d’oreiller, récupérer les chaussettes qui ont séché au fond du duvet, les mettre, et enfin passer les chaussures. Puis corvée d’eau, elle n’est pas loin et elle est potable aujourd’hui, puis la faire chauffer, mélanger au succulent muesli lyophilisé, préparer du thé, plier l’abris, le duvet, le matelas et déjeuner. Petite vaisselle, replier le réchaud, ranger les poubelles et enfin faire le sac. Plus d’une heure s’est écoulée, je suis décidément plus lent en étant seul, ou est-ce la peur d’affronter une vérité que je ne veux pas voir ? Je démarre donc la montée vers le col d’Arrémoulit vers 8h. Le pas est lent, un peu gauche... j’ai l’impression que ce n’est pas moi qui marche. Quelques arythmies à chaque pauses mais finalement assez peu voire pas du tout en plein effort comme il y’a deux semaines. Je continue, le col est atteint peu avant 9h, je vais devoir prendre une décision. Derrière moi le confort, la facilité, et surtout la sécurité. Devant moi l’intimidant versant ouest du Balaïtous développement pas moins de 1000m, des rochers abrupts, des torrents, de la neige, pas de sentier très marqué, l’inconnu, un fabuleux terrain de jeux en temps normal, mais aujourd’hui c’est la peur qui domine. M’y engager signifierait dans un premier temps descendre 400m plus bas au Lac d’Ariel pour dans un second temps grimper cet imposant versant ouest. Je compte les échappatoires possibles et je me rends à l’évidence, s’engager seul dans ces conditions n’est pas raisonnable. Comme il y’a deux semaines, je pleure au pied du Balaïtous. Comme il y’a deux semaines je m’interroge sur l’avenir... Vers 10h je me remets en route, les larmes reprennent lorsque je tourne le dos au Balaïtous, je marche tel un robot, gagné par la tristesse et les doutes, mes pieds heurtent les rochers, je zigzague. Puis peu à peu je digère, je pense aux prochains jours, je projette mentalement des escalades moins rude (physiquement) au Caroux pour retrouver le moral... Puis je descends vers le Lac d’Artouste jusqu’ici inconnu à mes yeux, le plaisir de l’exploration de terres inconnues (à mes yeux évidement) offrant une légère consolation à ce périple entrain de s’achever, déjà. Je gagne ainsi la gare du train le plus haut d’Europe (c’est ce qu’ils disent sur les publicités) : le petit train d’Artouste qui me ramène à la station de ski éponyme, puis télécabine, stop (2 fois des Bretons !) et me voici de retour au lac de Bious Artigue. Fin d’un périple à peine commencé, j’espère pouvoir le reprendre là ou je l’ai laissé très vite...
Mardi 2 Août :
Retour dans les Pyrénées. Je pars cette fois en direction du Luchonnais avec Isa ou nous projetons de faire la voie « Adishatz » qui doit nous conduire au sommet du Pic des Spijeoles. Nous montons tout d’abord au Lac d’Espingo ou une voie prometteuse va nous permettre de nous échauffer sur les berges du lac : la voie « Emilie » en 4 longueurs. La montée s’effectue sans problèmes malgré un sac chargé, la « complétude » du refuge nous imposant le bivouac... La voie quand à elle ne tiendra pas ses promesses. Ainsi nous nous réchappons au départ de la 3ème longueur, les prises rondes et terreuses, la raréfaction des spits ne plaisant pas à Isa et ne m’inspirant guère plus. La journée se termine donc en mode bronzette sur la grève du Lac de Saussat ou nous avons prévus le bivouac...
Mercredi 3 Août :
Réveil 6h, départ 7h comme prévu. Il fait grand beau, les sacs sont considérablement allégés par rapport à la veille bien que nous emportions crampons et piolet en prévision du névé encore présent en cette fin juillet au pied de la voie (d’après les informations du gardien d’Espingo). La montée est raide, le chemin à peine tracé, l’avantage est que nous prenons vite du dénivelé. Vers 8h30 nous contemplons enfin la totalité de la voie et constatons que nous aurions probablement pu éviter de nous alourdir avec crampons et piolet... merci les conseils vaseux du gardien ! La fin de l’approche se fait donc sans soucis et vers 9h15 nous attaquons la voie : une belle escalade que nous parcourons en réversible Isa et moi. De très belles longueurs de grimpe, L2 une dalle très fine et soutenue, L5 avec une magnifique dalle sculptée rappelant le Caroux et surtout L9 (la dernière) offrant une magnifique escalade en fissure : un régal ! Nous parvenons ainsi au sommet vers 14h20 soit environ 5h après avoir attaqué, nous sommes dans les temps et en profitons pour prendre un bon picnic au sommet ! Petit bémol, mes palpitations sont de retour depuis L7, de quoi gâcher le plaisir et soulever encore et encore des doutes... La journée se poursuit avec l’interminable redescente aux granges d’Astau que nous atteignons vers 19h30 ! Longue descente donc, usante, et toujours mes palpitations... Vais-je pouvoir aller dans les Alpes semaine prochaine ? En attendant, fin de journée pizza à Luchon !
Retour dans les Pyrénées. Je pars cette fois en direction du Luchonnais avec Isa ou nous projetons de faire la voie « Adishatz » qui doit nous conduire au sommet du Pic des Spijeoles. Nous montons tout d’abord au Lac d’Espingo ou une voie prometteuse va nous permettre de nous échauffer sur les berges du lac : la voie « Emilie » en 4 longueurs. La montée s’effectue sans problèmes malgré un sac chargé, la « complétude » du refuge nous imposant le bivouac... La voie quand à elle ne tiendra pas ses promesses. Ainsi nous nous réchappons au départ de la 3ème longueur, les prises rondes et terreuses, la raréfaction des spits ne plaisant pas à Isa et ne m’inspirant guère plus. La journée se termine donc en mode bronzette sur la grève du Lac de Saussat ou nous avons prévus le bivouac...
Mercredi 3 Août :
Réveil 6h, départ 7h comme prévu. Il fait grand beau, les sacs sont considérablement allégés par rapport à la veille bien que nous emportions crampons et piolet en prévision du névé encore présent en cette fin juillet au pied de la voie (d’après les informations du gardien d’Espingo). La montée est raide, le chemin à peine tracé, l’avantage est que nous prenons vite du dénivelé. Vers 8h30 nous contemplons enfin la totalité de la voie et constatons que nous aurions probablement pu éviter de nous alourdir avec crampons et piolet... merci les conseils vaseux du gardien ! La fin de l’approche se fait donc sans soucis et vers 9h15 nous attaquons la voie : une belle escalade que nous parcourons en réversible Isa et moi. De très belles longueurs de grimpe, L2 une dalle très fine et soutenue, L5 avec une magnifique dalle sculptée rappelant le Caroux et surtout L9 (la dernière) offrant une magnifique escalade en fissure : un régal ! Nous parvenons ainsi au sommet vers 14h20 soit environ 5h après avoir attaqué, nous sommes dans les temps et en profitons pour prendre un bon picnic au sommet ! Petit bémol, mes palpitations sont de retour depuis L7, de quoi gâcher le plaisir et soulever encore et encore des doutes... La journée se poursuit avec l’interminable redescente aux granges d’Astau que nous atteignons vers 19h30 ! Longue descente donc, usante, et toujours mes palpitations... Vais-je pouvoir aller dans les Alpes semaine prochaine ? En attendant, fin de journée pizza à Luchon !
Samedi 6 Août :
J’ai finalement décidé de suivre Isa et Rémi dans les Alpes. Je me sens toujours comme une formule 1 avec un moteur de coccinelle. Mes palpitations semblent ne plus vouloir me lâcher, dois-je m’y habituer ? Faire avec ? Nous verrons bien...
Me voici dans le massif de l’Oisan. Un long, un très long trajet estival nous a amené la veille à Bourg d’Oisan, et en ce début d’après midi nous quittons le sympathique village de St Christophe en Oisan, depuis lequel nous entamons la remontée du très beau vallon de la Selle. La forme n’est pas trop mauvaise, toujours des palpitations à la moindre pause, au moindre changement de rythme, situation totalement inverse par rapport à début juillet... Allez comprendre. Bref, je fais avec et vers 18h30 nous parvenons au refuge de la Selle ou nous projetons de rester 2 jours.
J’ai finalement décidé de suivre Isa et Rémi dans les Alpes. Je me sens toujours comme une formule 1 avec un moteur de coccinelle. Mes palpitations semblent ne plus vouloir me lâcher, dois-je m’y habituer ? Faire avec ? Nous verrons bien...
Me voici dans le massif de l’Oisan. Un long, un très long trajet estival nous a amené la veille à Bourg d’Oisan, et en ce début d’après midi nous quittons le sympathique village de St Christophe en Oisan, depuis lequel nous entamons la remontée du très beau vallon de la Selle. La forme n’est pas trop mauvaise, toujours des palpitations à la moindre pause, au moindre changement de rythme, situation totalement inverse par rapport à début juillet... Allez comprendre. Bref, je fais avec et vers 18h30 nous parvenons au refuge de la Selle ou nous projetons de rester 2 jours.
Dimanche 7 Août :
Réveil 3h30. Départ 4h30. Qui dit Alpes, dit courses de neige, et qui dit course de neige au moi d’Août dit réveil aux aurores... Nous nous mettons en route à la lueur de nos frontales, la nuit est encore bien noire, la montagne est encore plongée dans l’obscurité malgré un ciel empli d’étoiles mais dépourvu de Lune. La première heure de marche s’effectue à un rythme de « réveil » sur un sentier remontant de multiples moraines, comme autant de vestiges d’une époque glaciaire révolue. Nous prenons ensuite pied sur le glacier de la Selle ou nous nous encordons, nous apercevons la brèche du Râteau, qui se découpe dans le ciel à l’autre bout du glacier et vers laquelle nous nous dirigeons. Nous gagnons la rimaye qui se traverse aujourd’hui sans difficultés. La suite : 50m d’escalade facile pas de 2 voire 3, mais dans un rocher délité par le retrait glaciaire. Là ou les anciens devaient grimper dans un beau couloir de neige, nous nous retrouvons à nous accrocher à des prises malsaines... Nous gagnons néanmoins sans encombre le haut de la brèche. Nous bifurquons désormais plein nord en direction du sommet du Râteau. D’abord dans des rochers faciles, puis sur une arête effilée en rocher moyen, et enfin par une belle arête de neige que nous entamons vers 7h15 dans un décor de plus en plus somptueux. Le vide se creuse autour de nous et la vue s’élargie, surgi tout d’abord au détour d’un béquet la Barre des Ecrins d’un blanc éclatant, puis la Meije vertigineuse, Les Bans, La Grande Ruine... Enfin, vers le sommet, c’est la quasi totalité des Alpes qui s’offre à nos yeux : Le Mont Blanc, Le Monte Viso, Le Mont Aiguille, Le Grand Veymont, Le Mont Rose... magnifique ! Vers 8h30 le sommet du Râteau est atteint ! Nous sommes à 3809m d’altitude et la montagne offre ses plus belles couleurs du matin ! J’ai bien fait de venir malgré tout...
Réveil 3h30. Départ 4h30. Qui dit Alpes, dit courses de neige, et qui dit course de neige au moi d’Août dit réveil aux aurores... Nous nous mettons en route à la lueur de nos frontales, la nuit est encore bien noire, la montagne est encore plongée dans l’obscurité malgré un ciel empli d’étoiles mais dépourvu de Lune. La première heure de marche s’effectue à un rythme de « réveil » sur un sentier remontant de multiples moraines, comme autant de vestiges d’une époque glaciaire révolue. Nous prenons ensuite pied sur le glacier de la Selle ou nous nous encordons, nous apercevons la brèche du Râteau, qui se découpe dans le ciel à l’autre bout du glacier et vers laquelle nous nous dirigeons. Nous gagnons la rimaye qui se traverse aujourd’hui sans difficultés. La suite : 50m d’escalade facile pas de 2 voire 3, mais dans un rocher délité par le retrait glaciaire. Là ou les anciens devaient grimper dans un beau couloir de neige, nous nous retrouvons à nous accrocher à des prises malsaines... Nous gagnons néanmoins sans encombre le haut de la brèche. Nous bifurquons désormais plein nord en direction du sommet du Râteau. D’abord dans des rochers faciles, puis sur une arête effilée en rocher moyen, et enfin par une belle arête de neige que nous entamons vers 7h15 dans un décor de plus en plus somptueux. Le vide se creuse autour de nous et la vue s’élargie, surgi tout d’abord au détour d’un béquet la Barre des Ecrins d’un blanc éclatant, puis la Meije vertigineuse, Les Bans, La Grande Ruine... Enfin, vers le sommet, c’est la quasi totalité des Alpes qui s’offre à nos yeux : Le Mont Blanc, Le Monte Viso, Le Mont Aiguille, Le Grand Veymont, Le Mont Rose... magnifique ! Vers 8h30 le sommet du Râteau est atteint ! Nous sommes à 3809m d’altitude et la montagne offre ses plus belles couleurs du matin ! J’ai bien fait de venir malgré tout...
Lundi 8 Août :
Grasse matinée aujourd’hui : réveil 5h30 ! Pas de neige au programme donc pas besoin de se lever aux aurores, enfin tout est relatif ! Néanmoins la course du jour s’annonce longue, l’objectif étant de gagner le refuge du Soreiller dans une autre vallée en passant par l’éperon nord de la Pointe d’Amont et l’Aiguille centrale du Soreiller ! La journée commence par une marche d’approche fastidieuse, tout d’abord descendre de 100m depuis le refuge de la Selle vers le torrent, le traverser, remonter une longue série de moraines croulantes sur 200~300m de dénivelé, atteindre le glacier est du Diable, y prendre pied, s’encorder, chausser les crampons, traverser en slalomant entre les crevasses et enfin atteindre la rimaye et le pied de la voie vers 2800m d’altitude environ : de quoi nous occuper les deux premières heures de la journée ! Nous débutons notre progression par une série de gradins, terrasses herbeuses et vires avant d’atteindre enfin le fil de l’arête ou l’escalade va vraiment commencer pour les 500 prochains mètres ! Nous continuons de progresser en corde tendue, le premier ressaut n’excédant pas le 4, mais ça grimpe quand même et je dois parfois réfléchir étant en tête bien que la cordée précédente (2 allemands avec leur guide) montre le chemin. Nous avançons bien mais sommes régulièrement stoppés par l’autre cordée que nous ne pouvons pas (ou n’osons pas) doubler. Arrivés au pied du deuxième ressaut, plus difficile (4+/5+) Isa passe en tête et nous emmènent Rémi et moi. Nous faisons des longueurs, le rocher est très beau mais parfois délicat, l’itinéraire pas toujours évident... Ne comprenant pas grand chose au topo, suivant parfois bêtement la cordée de devant nous finissons par perdre le fil. Nous croyons même un instant être perdu dans la face... L’intuition nous fait faire une traversée horizontale de 20m à gauche ou nous pensons pouvoir retrouver la voie. Le rocher est assez malsain, les protections moyennes, nous nous appliquons à rejoindre une vire plus accueillante. De là nous observons, longuement, puis nous apercevons un piton très haut au dessus de nous, est-ce la bonne voie ? Isa repart, d’abord légèrement à droite puis aperçois bientôt un autre piton plus bas cette fois mais toujours décalé à gauche. Elle le rejoint puis se dirige vers le suivant. A ce moment là Rémi depuis le relais alors que j’assure Isa remarque encore un autre piton, à notre hauteur et seulement 2m à gauche ! Cette fois c’est sur nous avons retrouvé la voie, nous rassurons Isa qui arrive aa passage clé du ressaut et de la voie complète, un mur raide voire déversant pourvus de bonnes prises. Elle passe en douceur sans problème et nous fait monter au relais dans une sorte de trou ou la cordée précédente était restée cachée de longues minutes. Nous voilà rassurés. Mais entre temps, les minutes se sont écoulés, on ne va pas battre des records de vitesse aujourd’hui ! Rémi prend la suite pour une longueur un peu délicate, en effet après avoir franchi un court mur de 10m, la voie redescend ensuite sur plus de 30m pour contourner un grand gendarme. Désescalade délicate, et encore les minutes qui s’écoulent... Isa et moi au relais nous demandons ce qu’il se passe, que fait Rémi ? Sommes-nous encore perdus ? Nous comprenons plus tard les raisons de ses longues minutes d’attente, la désescalade est plus que délicate et au final nous aurions pris encore plus de temps si nous avions tiré un rappel, bonne décision de Rémi. Nous le rejoignons en redoublant de vigilance, la désescalade en second revenant à grimper en tête... La suite semble plus facile, nous sommes repassés au soleil et à cet instant nous pensons qu’en une ou deux longueurs en corde tendue nous seront sortis de la voie... erreur. C’est facile oui, mais le rocher est délicat voir mauvais par endroit, c’est plus long que ce que nous pensons, et l’itinéraire en terrain facile n’est jamais simple à trouver... Bref les minutes passent encore et avec le retour au soleil la chaleur et le mal aux pieds dans les chaussons. Il nous tarde arriver au sommet pour trouver cette vire qui doit nous ramener au pied de l’Aiguille Centrale du Soreiller. Pour passer le temps Isa et moi chantons. Nous transformons ce petit bout des Alpes en salle des fêtes passant en revue le répertoire des pires chansons qu’on entend (malheureusement encore de nos jours) dans les mariages : Image, Gilbert Montagné, La compagnie Créole, Gold... et j’en passe. Le temps passe plus vite, le rocher s’améliore, l’escalade s’accélère, la douleur aux pieds se fait oublier par la souffrance de nos tympans et nous finissons par arriver à la vire prometteuse d’un bon picnic ! Le topo indique que cette vire permet d’éviter le sommet de la Pointe d’Amont, là ou le rocher devient complètement pourri... Nous n’irions pas vérifier et empruntons cette vire salvatrice, au dessus de nous se dresse le sommet qui n’est rien d’autre qu’un tas de cailloux croulants, une ruine. Nous parvenons à un col au pied de l’aiguille centrale du Soreiller, d’ici nous apercevons l’autre vallée dans laquelle nous allons descendre, mais avant cela picnic bien mérité il est déjà 16h30 ! Nous repartons vers 17h, je repars en tête de cordée pour gagner l’aiguille centrale du Soreiller. Nous démarrons une autre course en quelque sorte... L’arête est facile mais par endroits très effilée et très vertigineuse, de chaque coté du fil, le vide se fait immense. Je me régale malgré la fatigue et l’heure tardive, fait une erreur d’itinéraire rattrapée par un demi-tour sur les conseils d’Isa et en quelques minutes nous gagnons le sommet de l’Aiguille centrale du Sorreiller à 3338m d’altitude ! Nous profitons un court instant de la vue somptueuse sur l’aiguille Dibona éclairée par une lumière du soir des plus envoutante. Mais pas le temps de trainer, le refuge est encore loin. Encore quelques longueurs sur l’arête en descente, un premier rappel, et là au lieu de suivre les indications du topo nous suivons bêtement la cordée de devant et nous engageons dans un deuxième rappel, puis un troisième que nous renforçons avec une cordelette neuve... Nous gagnons enfin un névé en contrebas, puis par une série de vires nous retrouvons la voie normale de l’aiguille Dibona qui nous conduit en quelques minutes au refuge du Soreiller ! Il est 19h30, cette belle journée s’achève au pied de la majestueuse aiguille Dibona !
Grasse matinée aujourd’hui : réveil 5h30 ! Pas de neige au programme donc pas besoin de se lever aux aurores, enfin tout est relatif ! Néanmoins la course du jour s’annonce longue, l’objectif étant de gagner le refuge du Soreiller dans une autre vallée en passant par l’éperon nord de la Pointe d’Amont et l’Aiguille centrale du Soreiller ! La journée commence par une marche d’approche fastidieuse, tout d’abord descendre de 100m depuis le refuge de la Selle vers le torrent, le traverser, remonter une longue série de moraines croulantes sur 200~300m de dénivelé, atteindre le glacier est du Diable, y prendre pied, s’encorder, chausser les crampons, traverser en slalomant entre les crevasses et enfin atteindre la rimaye et le pied de la voie vers 2800m d’altitude environ : de quoi nous occuper les deux premières heures de la journée ! Nous débutons notre progression par une série de gradins, terrasses herbeuses et vires avant d’atteindre enfin le fil de l’arête ou l’escalade va vraiment commencer pour les 500 prochains mètres ! Nous continuons de progresser en corde tendue, le premier ressaut n’excédant pas le 4, mais ça grimpe quand même et je dois parfois réfléchir étant en tête bien que la cordée précédente (2 allemands avec leur guide) montre le chemin. Nous avançons bien mais sommes régulièrement stoppés par l’autre cordée que nous ne pouvons pas (ou n’osons pas) doubler. Arrivés au pied du deuxième ressaut, plus difficile (4+/5+) Isa passe en tête et nous emmènent Rémi et moi. Nous faisons des longueurs, le rocher est très beau mais parfois délicat, l’itinéraire pas toujours évident... Ne comprenant pas grand chose au topo, suivant parfois bêtement la cordée de devant nous finissons par perdre le fil. Nous croyons même un instant être perdu dans la face... L’intuition nous fait faire une traversée horizontale de 20m à gauche ou nous pensons pouvoir retrouver la voie. Le rocher est assez malsain, les protections moyennes, nous nous appliquons à rejoindre une vire plus accueillante. De là nous observons, longuement, puis nous apercevons un piton très haut au dessus de nous, est-ce la bonne voie ? Isa repart, d’abord légèrement à droite puis aperçois bientôt un autre piton plus bas cette fois mais toujours décalé à gauche. Elle le rejoint puis se dirige vers le suivant. A ce moment là Rémi depuis le relais alors que j’assure Isa remarque encore un autre piton, à notre hauteur et seulement 2m à gauche ! Cette fois c’est sur nous avons retrouvé la voie, nous rassurons Isa qui arrive aa passage clé du ressaut et de la voie complète, un mur raide voire déversant pourvus de bonnes prises. Elle passe en douceur sans problème et nous fait monter au relais dans une sorte de trou ou la cordée précédente était restée cachée de longues minutes. Nous voilà rassurés. Mais entre temps, les minutes se sont écoulés, on ne va pas battre des records de vitesse aujourd’hui ! Rémi prend la suite pour une longueur un peu délicate, en effet après avoir franchi un court mur de 10m, la voie redescend ensuite sur plus de 30m pour contourner un grand gendarme. Désescalade délicate, et encore les minutes qui s’écoulent... Isa et moi au relais nous demandons ce qu’il se passe, que fait Rémi ? Sommes-nous encore perdus ? Nous comprenons plus tard les raisons de ses longues minutes d’attente, la désescalade est plus que délicate et au final nous aurions pris encore plus de temps si nous avions tiré un rappel, bonne décision de Rémi. Nous le rejoignons en redoublant de vigilance, la désescalade en second revenant à grimper en tête... La suite semble plus facile, nous sommes repassés au soleil et à cet instant nous pensons qu’en une ou deux longueurs en corde tendue nous seront sortis de la voie... erreur. C’est facile oui, mais le rocher est délicat voir mauvais par endroit, c’est plus long que ce que nous pensons, et l’itinéraire en terrain facile n’est jamais simple à trouver... Bref les minutes passent encore et avec le retour au soleil la chaleur et le mal aux pieds dans les chaussons. Il nous tarde arriver au sommet pour trouver cette vire qui doit nous ramener au pied de l’Aiguille Centrale du Soreiller. Pour passer le temps Isa et moi chantons. Nous transformons ce petit bout des Alpes en salle des fêtes passant en revue le répertoire des pires chansons qu’on entend (malheureusement encore de nos jours) dans les mariages : Image, Gilbert Montagné, La compagnie Créole, Gold... et j’en passe. Le temps passe plus vite, le rocher s’améliore, l’escalade s’accélère, la douleur aux pieds se fait oublier par la souffrance de nos tympans et nous finissons par arriver à la vire prometteuse d’un bon picnic ! Le topo indique que cette vire permet d’éviter le sommet de la Pointe d’Amont, là ou le rocher devient complètement pourri... Nous n’irions pas vérifier et empruntons cette vire salvatrice, au dessus de nous se dresse le sommet qui n’est rien d’autre qu’un tas de cailloux croulants, une ruine. Nous parvenons à un col au pied de l’aiguille centrale du Soreiller, d’ici nous apercevons l’autre vallée dans laquelle nous allons descendre, mais avant cela picnic bien mérité il est déjà 16h30 ! Nous repartons vers 17h, je repars en tête de cordée pour gagner l’aiguille centrale du Soreiller. Nous démarrons une autre course en quelque sorte... L’arête est facile mais par endroits très effilée et très vertigineuse, de chaque coté du fil, le vide se fait immense. Je me régale malgré la fatigue et l’heure tardive, fait une erreur d’itinéraire rattrapée par un demi-tour sur les conseils d’Isa et en quelques minutes nous gagnons le sommet de l’Aiguille centrale du Sorreiller à 3338m d’altitude ! Nous profitons un court instant de la vue somptueuse sur l’aiguille Dibona éclairée par une lumière du soir des plus envoutante. Mais pas le temps de trainer, le refuge est encore loin. Encore quelques longueurs sur l’arête en descente, un premier rappel, et là au lieu de suivre les indications du topo nous suivons bêtement la cordée de devant et nous engageons dans un deuxième rappel, puis un troisième que nous renforçons avec une cordelette neuve... Nous gagnons enfin un névé en contrebas, puis par une série de vires nous retrouvons la voie normale de l’aiguille Dibona qui nous conduit en quelques minutes au refuge du Soreiller ! Il est 19h30, cette belle journée s’achève au pied de la majestueuse aiguille Dibona !
Mardi 9 Août :
Grasse matinée + fatigue + ciel gris = on redescend. Certains diront que nous aurions pu enchainer avec l’Aiguille Dibona aujourd’hui, c’est vrai c’était tentant mais même par grand beau pas certain qu’on y serait allé. Redescente en vallée donc et sans regrets, les premières gouttes faisant leur apparition dès le milieu de journée... On reviendra pour la Dibona !
Grasse matinée + fatigue + ciel gris = on redescend. Certains diront que nous aurions pu enchainer avec l’Aiguille Dibona aujourd’hui, c’est vrai c’était tentant mais même par grand beau pas certain qu’on y serait allé. Redescente en vallée donc et sans regrets, les premières gouttes faisant leur apparition dès le milieu de journée... On reviendra pour la Dibona !
Jeudi 11 Août :
Après une bonne journée en vallée, consacrée à la fois au repos et à l’organisation de notre prochaine course, nous voici de nouveau en marche. Nous quittons le petit village pittoresque de La Bérarde vers 11h, et commençons à remonter la longue vallée des Etançons, il fait bon, depuis quelques jours l’ambiance est moins caniculaire et ce n’est pas pour nous déplaire. Le ciel est pur, la rosé du matin pas encore évaporée dans les zones ombrées, et à cet altitude, des fleurs, des torrents, de l’herbe, et même des arbres. De quoi commencer calmement cette aventure, car il s’agit bien de cela : l’aventure ! Quelques minutes de marche et là devant nous au détour d’un vallon secondaire, la face sud de la Meije se découvre, s’impose, rempli le paysage, domine, d’un seul coup. Ma gorge se serre, j’en frissonne. Demain si tout va bien nous devrions approcher de son sommet, voici maintenant 24h que je ne pense plus qu’à elle : la Meije, depuis que nous avons pris la décision de tenter sa traversée... Comment est-ce possible ? Moi qui encore 5 ans en arrière commençais tout juste à grimper, je crois rêver, jamais je n’aurais imaginé à cet époque pouvoir un jour m’attaquer à une telle course. Plus nous avançons, plus la face en impose, nous la voyons maintenant dans toute sa largeur, du sommet de la Meije à gauche, à la pointe orientale à droite en passant par les quatres dents et le Doigt de Dieu. La paroi est immense. J’ai beau me répéter que j’en suis capable, je n’ose pas y croire, Isa et Rémi semblent en être au même point et si les certitudes ne font jamais partie du jeu en montagne, cette fois l’emploi du subjonctif est systématique dans nos échanges, tout juste si on ose dire que nous serons peut être là haut demain... Cette marche contemplative se poursuit tranquillement dans cette vallée plutôt plate, il est désormais impossible de penser à autre chose qu’à la Meije... Nous dépassons le refuge du Chatelerêt et entamons la remontée des premières moraines. Le dernier replat sera le lieu d’une pause picnic avant d’en finir en remontant une longue moraine, assez raide, un peu croulante mais moins mauvaise et difficile que nous pouvions l’imaginer vue d’en bas. Encore quelques obstacles, roches moutonnées, névés, puis échelle et nous voici au refuge du Promontoire encré dans la paroi à 3092m d’altitude. Le reste de la journée sera consacré au repos. De toute façon nous sommes entourés de vide, et de parois abruptes. Photo, lecture, thé, rythment cette fin d’après midi, j’essaye de penser à autre chose qu’à l’ascension de demain...
Après une bonne journée en vallée, consacrée à la fois au repos et à l’organisation de notre prochaine course, nous voici de nouveau en marche. Nous quittons le petit village pittoresque de La Bérarde vers 11h, et commençons à remonter la longue vallée des Etançons, il fait bon, depuis quelques jours l’ambiance est moins caniculaire et ce n’est pas pour nous déplaire. Le ciel est pur, la rosé du matin pas encore évaporée dans les zones ombrées, et à cet altitude, des fleurs, des torrents, de l’herbe, et même des arbres. De quoi commencer calmement cette aventure, car il s’agit bien de cela : l’aventure ! Quelques minutes de marche et là devant nous au détour d’un vallon secondaire, la face sud de la Meije se découvre, s’impose, rempli le paysage, domine, d’un seul coup. Ma gorge se serre, j’en frissonne. Demain si tout va bien nous devrions approcher de son sommet, voici maintenant 24h que je ne pense plus qu’à elle : la Meije, depuis que nous avons pris la décision de tenter sa traversée... Comment est-ce possible ? Moi qui encore 5 ans en arrière commençais tout juste à grimper, je crois rêver, jamais je n’aurais imaginé à cet époque pouvoir un jour m’attaquer à une telle course. Plus nous avançons, plus la face en impose, nous la voyons maintenant dans toute sa largeur, du sommet de la Meije à gauche, à la pointe orientale à droite en passant par les quatres dents et le Doigt de Dieu. La paroi est immense. J’ai beau me répéter que j’en suis capable, je n’ose pas y croire, Isa et Rémi semblent en être au même point et si les certitudes ne font jamais partie du jeu en montagne, cette fois l’emploi du subjonctif est systématique dans nos échanges, tout juste si on ose dire que nous serons peut être là haut demain... Cette marche contemplative se poursuit tranquillement dans cette vallée plutôt plate, il est désormais impossible de penser à autre chose qu’à la Meije... Nous dépassons le refuge du Chatelerêt et entamons la remontée des premières moraines. Le dernier replat sera le lieu d’une pause picnic avant d’en finir en remontant une longue moraine, assez raide, un peu croulante mais moins mauvaise et difficile que nous pouvions l’imaginer vue d’en bas. Encore quelques obstacles, roches moutonnées, névés, puis échelle et nous voici au refuge du Promontoire encré dans la paroi à 3092m d’altitude. Le reste de la journée sera consacré au repos. De toute façon nous sommes entourés de vide, et de parois abruptes. Photo, lecture, thé, rythment cette fin d’après midi, j’essaye de penser à autre chose qu’à l’ascension de demain...
Vendredi 12 Août :
Réveil 4h15. Départ 5h. La nuit a été moyenne, beaucoup de palpitations, je me dis que c’est dans la tête à cause de l’enjeu. L’escalade commence directement depuis la terrasse du refuge, et je pars en tête poussé par l’envie d’en découdre, et pour tenter de me rassurer sur mes capacités amoindries ces derniers temps par mon cœur toujours aussi capricieux... Dès les premiers mètres je constate que je suis partis trop couvert, il fait plus chaud que ce que je pensais, mais je continue, d’abord par des gradins faciles, puis après une petite brèche me voici au pied de la première difficulté de la voie, seulement 30m au dessus du refuge : « le pas du crapaud ». Ce pas consiste à passer un petit ressaut déversant, coté dans le 3. Je pose un friend et me lance sans trop savoir, en basculant vers la gauche dans le noir, ça passe, mais ça réveille ! Je continue quelques mètres jusqu’à un replat et assure Isa et Rémi sur un béquet. Tout va bien, puis d’un seul coup sans prévenir, mon cœur s’emballe, crise de tachycardie... Une fois tous en sécurité sur le petit replat, machinalement, je m’assoie, enlève mon sac à dos et en sors la trousse de secours. J’avale 20mg de mon médicament magique, commence alors l’attente... Devons nous renoncer ? La redescente depuis ici serait facile, Isa et Rémi pourrait même repartir dans la voie une fois que je serais en sécurité au refuge. On se donne une limite, si je ne vais pas mieux dans les 5~10 minutes on rebrousse chemin. Les minutes semblent durer des heures, les autres cordées nous doublent. J’essaye de rester le plus calme possible mais j’ai du mal à contenir mes larmes à la simple pensée d’abandonner, de tourner le dos à la Meije... Puis c’est la délivrance, mon cœur bat à nouveau régulièrement et lentement. Mon soulagement est relatif et de courte durée, je dois décider de la suite. Les pensées fusent, difficile d’y voir clair et de prendre du recul, le temps tourne, la course est longue, je dois décider vite. Je revis cette scène encore une fois. En dessous de moi : la facilité, la sécurité du refuge, le secours possible. Au dessus de moi : la longue traversée de la Meije, 900m d’escalade jusqu’au sommet, il nous faudra 6 à 8h si tout va bien puis encore 6 à 8h de plus pour traverser et rejoindre le refuge de l’Aigle de l’autre coté, du rocher, de la neige, de la glace, le secours pas forcément possible. Quelques minutes, nous repartons vers le haut, j’ai décidé de continuer. Mais j’ai du mal à digérer ma décision. Est-ce de la folie ? Vais-je le regretter ? Vais-je le payer cher ? Vais-je mettre en péril Isa et Rémi ? La suite de la voie est facile, je me contente de grimper en second, tel un robot, j’essaye de me vider l’esprit, de ne plus me dire que ma décision est égoïste et dangereuse. Mais comment penser à autre chose ? Le levé du jour et la vue soudaine de la beauté des cimes m’aide. La régularité relative de mon cœur aussi. Le demi-tour est encore possible, je me fixe alors des objectifs à court terme : si ça va jusqu’au campement des demoiselles je continue, puis de là, la base du couloir Duhamel, puis le haut du couloir et ainsi de suite jusqu’à atteindre le pied de la muraille Castelnau constituant la principale difficulté de la voie. Nous y faisons un pause, le temps pour moi de souffler un peu mentalement, je me dis alors que si je suis parvenus jusqu’ici j’irais bien jusqu’au sommet... Nous continuons, Rémi est en tête, je me contente de grimper au mieux malgré la fatigue et le stress générés par ma crise de tachycardie, la chute même en second est interdite. Nous traversons à droite par une large vire, puis revenons à gauche, avant de franchir quelques passages de 4/4+ caractéristiques : le « dos d’âne » puis le « pas du chat ». Enfin après une vire étroite et vertigineuse nous voici au bas du glacier Carré. Les plus grosses difficultés d’escalade sont désormais derrière nous, et nous avons mis à peine plus de 4h pour arriver ici ce qui n’est pas si mal pour une cordée de 3 et sachant que d’après le gardien du Promontoire nous en sommes au tiers de la course, l’arrivée à l’Aigle sans sortir la frontale semble jouable, de quoi nous remonter le moral ! Je repars en tête pour la traversée du glacier Carré, qui n’est pas difficile mais ou la chute est absolument interdite. Concentration maximale au départ dans la traversée la plus raide, puis nous progressons plus rapidement ensuite jusqu’à atteindre le pied du grand Pic. Nous remettons alors piolet et crampons dans le sac pour attaquer les dernières longueurs de grimpe qui vont nous mener au sommet de la Meije. Isa repasse en tête et nous ouvre la voie dans un terrain certes facile (coté de 2 à 3), mais ou l’itinéraire n’est pas des plus aisé (pour passer au plus facile) et ou la pose de protections n’est pas toujours évidente. Nous progressons cependant à un bon rythme et atteignons enfin le fameux passage du « cheval rouge » dont je ne cesse de rêver depuis ma première ascension du Rocher Marre au Caroux en 2013 avec Sylvain. En effet selon les anciens grimpeurs Carousiens, le passage clé de cette voie n’est pas sans rappeler le « cheval rouge » de la Meije. Depuis je rêve intérieurement de grimper un jour dans ce fameux passage à la Meije... Nous y sommes, certes pas des les meilleures conditions pour moi, mais quand même, il est là quelques mètres au dessus du relais dont j’oubli l’inconfort. J’assure Isa qui protège le pas, bien à cheval, un pied dans la face nord, l’autre dans la face sud, puis elle disparait, quelques minutes passent et elle nous crie j’ai passé le surplomb ! Relais ! A vous ! Je m’élance, et je m’applique à bien grimper, déjà que je suis en second il ne s’agirait pas d’écorner mon futur souvenir en faisant une zipette ici. Je grimpe lentement, pose mes pieds sur les minuscules prises patinées (on est très nombreux depuis 1877 à être passés ici), utilise au mieux la fissure de droite au fond du dièdre pour les mains, puis saisi la crête séparant face nord et face sud des deux mains, me hisse et surprise, entre mes mains le Mont Blanc au loin ! D’un mouvement ascendant, je projette ma jambe gauche en versant nord, me voilà assis sur le cheval rouge de la Meije ! La joie domine à cet instant, je profite autant que possible assis là à cheval et repars dans une certaine euphorie, pour les derniers mètres jusqu’au sommet... Il est midi pile, nous sommes au sommet de la Meije à 3984m d’altitude ! Je craque, je peine à contenir mes larmes, à l’intérieur un sentiment de bonheur infini croise des sentiments plus noirs. Surgissent alors plusieurs épisodes tristes de ma vie enfouis depuis longtemps. Je n’ai jamais ressenti cela avant. Mes larmes naissent et se nourrissent à la fois de joie et de tristesse, je ne comprends pas ce qu’il m’arrive, je suis sans mots. Quelques minutes passent, je retrouve un peu la paix intérieure, mais les mots ne sortent toujours pas, je prends seulement deux photos au sommet... Il est l’heure de manger, ce sera l’un des plus beau pique nique de ma vie. Nous prenons le temps, il n’est pas tard et bien que la suite soit encore longue, nous sommes désormais quasi assurés de sortir avant la nuit et même d’arriver à l’heure pour le repas au refuge de l’Aigle. Nous profitons de l’instant puis il est déjà l’heure de repartir. Une nouvelle course démarre, la traversée des dents. Nous gagnons tout d’abord la brèche Zsigmondy en deux rappels. Puis nous chaussons les crampons et sortons le piolet pour contourner la première dent en face nord. Changement de décor, le rocher laisse place à la glace, nous sommes bien aidés et rassurés par le câble qui facilite le contournement, en descente, en traversée puis dans la remontée dans une sorte de goulotte. Nous prenons du plaisir à mettre en applications les techniques de cascade de glace assimilée durant l’hiver : cramponnage sur les pointes avant, et piolet traction ! Cela nous occupe pas mal de temps, juste ce qu’il faut pour oublier qu’au bout des pieds il y’a des orteils... Heureusement nous gagnons assez vite le sommet de la deuxième dent et avec elle le retour au soleil ! La suite de la traversée est facile et très plaisante bien que la chute d’un coté comme de l’autre soit totalement interdite, vigilance maximum ! Le décor est magique, l’arête est quasiment partout en neige, et cela facilite la progression. Un rappel depuis la quatrième dent, puis ascension du Doigt de Dieu pour finir cette magnifique traversée. Nous profitons quelques minutes au sommet puis nous gagnons le glacier du Tabuchet en trois rappels. Nous nous recordons en configuration glacier, ce n’est pas encore le moment de relâcher notre attention, les crevasses sont encore bien bouchées mais plus pour très longtemps, s’agirait pas de tomber dans un trou maintenant, la course se termine à 20m du refuge seulement. Les couleurs du soir envahissent la montagne, et à l’approche du refuge nous pouvons enfin relâcher notre vigilance. Nous nous décordons et gravissons les derniers mètres menant au refuge, qui me sembleront interminables, c’est comme si je venais de me vider de toute mon énergie d’un seul coup ! L’accueil au refuge est excellent, une belle soirée pour fêter cette magnifique journée.
Réveil 4h15. Départ 5h. La nuit a été moyenne, beaucoup de palpitations, je me dis que c’est dans la tête à cause de l’enjeu. L’escalade commence directement depuis la terrasse du refuge, et je pars en tête poussé par l’envie d’en découdre, et pour tenter de me rassurer sur mes capacités amoindries ces derniers temps par mon cœur toujours aussi capricieux... Dès les premiers mètres je constate que je suis partis trop couvert, il fait plus chaud que ce que je pensais, mais je continue, d’abord par des gradins faciles, puis après une petite brèche me voici au pied de la première difficulté de la voie, seulement 30m au dessus du refuge : « le pas du crapaud ». Ce pas consiste à passer un petit ressaut déversant, coté dans le 3. Je pose un friend et me lance sans trop savoir, en basculant vers la gauche dans le noir, ça passe, mais ça réveille ! Je continue quelques mètres jusqu’à un replat et assure Isa et Rémi sur un béquet. Tout va bien, puis d’un seul coup sans prévenir, mon cœur s’emballe, crise de tachycardie... Une fois tous en sécurité sur le petit replat, machinalement, je m’assoie, enlève mon sac à dos et en sors la trousse de secours. J’avale 20mg de mon médicament magique, commence alors l’attente... Devons nous renoncer ? La redescente depuis ici serait facile, Isa et Rémi pourrait même repartir dans la voie une fois que je serais en sécurité au refuge. On se donne une limite, si je ne vais pas mieux dans les 5~10 minutes on rebrousse chemin. Les minutes semblent durer des heures, les autres cordées nous doublent. J’essaye de rester le plus calme possible mais j’ai du mal à contenir mes larmes à la simple pensée d’abandonner, de tourner le dos à la Meije... Puis c’est la délivrance, mon cœur bat à nouveau régulièrement et lentement. Mon soulagement est relatif et de courte durée, je dois décider de la suite. Les pensées fusent, difficile d’y voir clair et de prendre du recul, le temps tourne, la course est longue, je dois décider vite. Je revis cette scène encore une fois. En dessous de moi : la facilité, la sécurité du refuge, le secours possible. Au dessus de moi : la longue traversée de la Meije, 900m d’escalade jusqu’au sommet, il nous faudra 6 à 8h si tout va bien puis encore 6 à 8h de plus pour traverser et rejoindre le refuge de l’Aigle de l’autre coté, du rocher, de la neige, de la glace, le secours pas forcément possible. Quelques minutes, nous repartons vers le haut, j’ai décidé de continuer. Mais j’ai du mal à digérer ma décision. Est-ce de la folie ? Vais-je le regretter ? Vais-je le payer cher ? Vais-je mettre en péril Isa et Rémi ? La suite de la voie est facile, je me contente de grimper en second, tel un robot, j’essaye de me vider l’esprit, de ne plus me dire que ma décision est égoïste et dangereuse. Mais comment penser à autre chose ? Le levé du jour et la vue soudaine de la beauté des cimes m’aide. La régularité relative de mon cœur aussi. Le demi-tour est encore possible, je me fixe alors des objectifs à court terme : si ça va jusqu’au campement des demoiselles je continue, puis de là, la base du couloir Duhamel, puis le haut du couloir et ainsi de suite jusqu’à atteindre le pied de la muraille Castelnau constituant la principale difficulté de la voie. Nous y faisons un pause, le temps pour moi de souffler un peu mentalement, je me dis alors que si je suis parvenus jusqu’ici j’irais bien jusqu’au sommet... Nous continuons, Rémi est en tête, je me contente de grimper au mieux malgré la fatigue et le stress générés par ma crise de tachycardie, la chute même en second est interdite. Nous traversons à droite par une large vire, puis revenons à gauche, avant de franchir quelques passages de 4/4+ caractéristiques : le « dos d’âne » puis le « pas du chat ». Enfin après une vire étroite et vertigineuse nous voici au bas du glacier Carré. Les plus grosses difficultés d’escalade sont désormais derrière nous, et nous avons mis à peine plus de 4h pour arriver ici ce qui n’est pas si mal pour une cordée de 3 et sachant que d’après le gardien du Promontoire nous en sommes au tiers de la course, l’arrivée à l’Aigle sans sortir la frontale semble jouable, de quoi nous remonter le moral ! Je repars en tête pour la traversée du glacier Carré, qui n’est pas difficile mais ou la chute est absolument interdite. Concentration maximale au départ dans la traversée la plus raide, puis nous progressons plus rapidement ensuite jusqu’à atteindre le pied du grand Pic. Nous remettons alors piolet et crampons dans le sac pour attaquer les dernières longueurs de grimpe qui vont nous mener au sommet de la Meije. Isa repasse en tête et nous ouvre la voie dans un terrain certes facile (coté de 2 à 3), mais ou l’itinéraire n’est pas des plus aisé (pour passer au plus facile) et ou la pose de protections n’est pas toujours évidente. Nous progressons cependant à un bon rythme et atteignons enfin le fameux passage du « cheval rouge » dont je ne cesse de rêver depuis ma première ascension du Rocher Marre au Caroux en 2013 avec Sylvain. En effet selon les anciens grimpeurs Carousiens, le passage clé de cette voie n’est pas sans rappeler le « cheval rouge » de la Meije. Depuis je rêve intérieurement de grimper un jour dans ce fameux passage à la Meije... Nous y sommes, certes pas des les meilleures conditions pour moi, mais quand même, il est là quelques mètres au dessus du relais dont j’oubli l’inconfort. J’assure Isa qui protège le pas, bien à cheval, un pied dans la face nord, l’autre dans la face sud, puis elle disparait, quelques minutes passent et elle nous crie j’ai passé le surplomb ! Relais ! A vous ! Je m’élance, et je m’applique à bien grimper, déjà que je suis en second il ne s’agirait pas d’écorner mon futur souvenir en faisant une zipette ici. Je grimpe lentement, pose mes pieds sur les minuscules prises patinées (on est très nombreux depuis 1877 à être passés ici), utilise au mieux la fissure de droite au fond du dièdre pour les mains, puis saisi la crête séparant face nord et face sud des deux mains, me hisse et surprise, entre mes mains le Mont Blanc au loin ! D’un mouvement ascendant, je projette ma jambe gauche en versant nord, me voilà assis sur le cheval rouge de la Meije ! La joie domine à cet instant, je profite autant que possible assis là à cheval et repars dans une certaine euphorie, pour les derniers mètres jusqu’au sommet... Il est midi pile, nous sommes au sommet de la Meije à 3984m d’altitude ! Je craque, je peine à contenir mes larmes, à l’intérieur un sentiment de bonheur infini croise des sentiments plus noirs. Surgissent alors plusieurs épisodes tristes de ma vie enfouis depuis longtemps. Je n’ai jamais ressenti cela avant. Mes larmes naissent et se nourrissent à la fois de joie et de tristesse, je ne comprends pas ce qu’il m’arrive, je suis sans mots. Quelques minutes passent, je retrouve un peu la paix intérieure, mais les mots ne sortent toujours pas, je prends seulement deux photos au sommet... Il est l’heure de manger, ce sera l’un des plus beau pique nique de ma vie. Nous prenons le temps, il n’est pas tard et bien que la suite soit encore longue, nous sommes désormais quasi assurés de sortir avant la nuit et même d’arriver à l’heure pour le repas au refuge de l’Aigle. Nous profitons de l’instant puis il est déjà l’heure de repartir. Une nouvelle course démarre, la traversée des dents. Nous gagnons tout d’abord la brèche Zsigmondy en deux rappels. Puis nous chaussons les crampons et sortons le piolet pour contourner la première dent en face nord. Changement de décor, le rocher laisse place à la glace, nous sommes bien aidés et rassurés par le câble qui facilite le contournement, en descente, en traversée puis dans la remontée dans une sorte de goulotte. Nous prenons du plaisir à mettre en applications les techniques de cascade de glace assimilée durant l’hiver : cramponnage sur les pointes avant, et piolet traction ! Cela nous occupe pas mal de temps, juste ce qu’il faut pour oublier qu’au bout des pieds il y’a des orteils... Heureusement nous gagnons assez vite le sommet de la deuxième dent et avec elle le retour au soleil ! La suite de la traversée est facile et très plaisante bien que la chute d’un coté comme de l’autre soit totalement interdite, vigilance maximum ! Le décor est magique, l’arête est quasiment partout en neige, et cela facilite la progression. Un rappel depuis la quatrième dent, puis ascension du Doigt de Dieu pour finir cette magnifique traversée. Nous profitons quelques minutes au sommet puis nous gagnons le glacier du Tabuchet en trois rappels. Nous nous recordons en configuration glacier, ce n’est pas encore le moment de relâcher notre attention, les crevasses sont encore bien bouchées mais plus pour très longtemps, s’agirait pas de tomber dans un trou maintenant, la course se termine à 20m du refuge seulement. Les couleurs du soir envahissent la montagne, et à l’approche du refuge nous pouvons enfin relâcher notre vigilance. Nous nous décordons et gravissons les derniers mètres menant au refuge, qui me sembleront interminables, c’est comme si je venais de me vider de toute mon énergie d’un seul coup ! L’accueil au refuge est excellent, une belle soirée pour fêter cette magnifique journée.
Samedi 13 Août :
Il ne reste plus qu’à redescendre aujourd’hui. Grasse matinée de circonstance, levé 7h30, nous prenons le temps pour nous préparer et prendre le petit déjeuner. L’ambiance au refuge est toujours aussi géniale, ponctuée par des airs d’accordéon joués par le gardien. Nous démarrons la descente vers 9h, ce n’est pas encore les vacances, nous nous encordons pour la première partie sur glacier. Le rythme est lent et nous profitons des derniers points de vue sur la Meije et sur les crevasses. Puis nous gagnons une vire équipée d’un câble en rive droite du glacier, nous continuons en crampons pour passer un gros névé en suivant, puis vient le moment de ranger crampons et piolet. Encore quelques pas de désescalade dans un rocher douteux, puis nous voici entrain de randonner paisiblement sur la longue descente menant au pont des brebis ou nous avons laissé une voiture. Nous ne faisons que quelques rares pauses et vers midi nous y sommes, retour à la civilisation... Pour combien de temps ?
Le périple dans les Alpes s’achève ici pour moi. Rémi et Isa, eux, seront au sommet du Mont Blanc seulement 3 jours plus tard, mais je n’ai pas de regrets ma forme ne m’aurait pas permis de suivre de toute façons... Je rentre, partagé entre la joie d’un certain sentiment d’avoir accompli une grande course d’alpinisme et le doute résultant des mes problèmes de cœur... Un grand merci à Rémi et Isa pour leur confiance malgré ma forme...
Il ne reste plus qu’à redescendre aujourd’hui. Grasse matinée de circonstance, levé 7h30, nous prenons le temps pour nous préparer et prendre le petit déjeuner. L’ambiance au refuge est toujours aussi géniale, ponctuée par des airs d’accordéon joués par le gardien. Nous démarrons la descente vers 9h, ce n’est pas encore les vacances, nous nous encordons pour la première partie sur glacier. Le rythme est lent et nous profitons des derniers points de vue sur la Meije et sur les crevasses. Puis nous gagnons une vire équipée d’un câble en rive droite du glacier, nous continuons en crampons pour passer un gros névé en suivant, puis vient le moment de ranger crampons et piolet. Encore quelques pas de désescalade dans un rocher douteux, puis nous voici entrain de randonner paisiblement sur la longue descente menant au pont des brebis ou nous avons laissé une voiture. Nous ne faisons que quelques rares pauses et vers midi nous y sommes, retour à la civilisation... Pour combien de temps ?
Le périple dans les Alpes s’achève ici pour moi. Rémi et Isa, eux, seront au sommet du Mont Blanc seulement 3 jours plus tard, mais je n’ai pas de regrets ma forme ne m’aurait pas permis de suivre de toute façons... Je rentre, partagé entre la joie d’un certain sentiment d’avoir accompli une grande course d’alpinisme et le doute résultant des mes problèmes de cœur... Un grand merci à Rémi et Isa pour leur confiance malgré ma forme...