Il est 17h45 en ce 13 Aout 2019, 3 alpinistes Lituaniens en terminent des rappels dans la face sud de la Pyramide du Tacul, sommet satellite de la face est du Mont Blanc du Tacul. Ils ont certainement passé une excellente journée à grimper son arête est qui se déroule sur 8 longueurs dans un rocher excellent, jamais difficile, et dans un cadre grandiose. Les derniers rappels les déposent sur une vire étroite qui surplombe la rimaye béante. En effet les conditions en cette mi-aout imposent un accès à la voie beaucoup plus haut que d’habitude, la rimaye étant bien trop ouverte et infranchissable à l’attaque classique au plus bas de l’arête. La corde est vite rappelée, 2 autres alpinistes (Allemands) en terminent aussi et installent déjà le denier rappel. Il est temps maintenant pour la cordée des trois Lituaniens d’enlever les chaussons, de remettre les « grosses » et les crampons qui permettrons de prendre à nouveau pied sur le glacier. La place sur la vire est étroite, aucun relai n’est installé par la cordée, et l’impensable se produit, l’un des alpiniste Lituanien perd l’équilibre, se rattrape à son compagnon qui perd aussitôt l’équilibre à son tour. Les deux hommes sont aspirés par le vide, ils se tiennent l’un à l’autre dans leur inéluctable chute. Le bruit des rebonds de la chair sur la roche est insupportable. En un instant les deux pantins disparaissent dans la rimaye comme avalés par le glacier. La scène s’est déroulée sous nos yeux impuissants, j’ai bien tenté de crier, d’alerter que le premier perdait l’équilibre… en vain.
Nous voici maintenant stoppés sur le glacier mes compagnons et moi, alors que nous venions simplement reconnaitre l’approche en préparation de l’ascension du lendemain. Nos corps trésaillent de l’horreur de la scène. Les cris de la troisième alpiniste de la cordée transpercent le brouillard qui recouvre par nappes intermittentes la montagne silencieuse. Comme un réflexe, je saisi mon téléphone dans ma poche, il y’a du réseau, je compose le 112 et explique la scène au PGHM de Chamonix. Je crie en anglais que je viens d’appeler les secours, et tente de rassurer la troisième alpiniste restée seule sur la vire. Nous nous remettons en route vers le pied de la voie, là ou nous nous trouvons nous sommes exposés aux chutes de séracs, il ne faut donc pas trainer. Nous cheminons dans une zone crevassée au pied de la parois avant la rimaye, j’aperçois un des deux alpinistes qui vient de tomber, il semble avoir été chanceux dans sa chute, il est environ 20m en contrebas sur une partie plate du glacier, un rebond sur la paroi l’aura certainement précipité là au-delà de la rimaye. Aucune nouvelle de son compagnon en revanche, de là ou nous somme nous ne voyons qu’une rimaye bien sombre et bien profonde. Le rescapé et sa compagne de cordée restée sur la vire tentent de l’appeler, la cordée suivante en termine des rappels et installe un relais sur la vire, essayons d’éviter les sur accidents… J’atteins enfin le pied de la paroi après quelques manœuvres périlleuses pour désescalader le bloc de glace bouchant la rimaye et donnant accès à la vire dans la paroi. Je fais monter mes compagnons de cordée en les assurant sur une écaille douteuse, les coinceurs et friends sont restés au bivouac...
Nous voici maintenant en sécurité ici protégés des chutes de séracs. Nous discutons en anglais avec l’alpiniste qui est restée sur la vire, nous tentons de comprendre si elle et son compagnon de cordée chanceux arrivent à communiquer avec le 3ème vraisemblablement tombé très bas dans la rimaye, 30m, 40m de chute peut être ? Puis commence alors la longue attente, nos oreilles sont à l’affut du bruit des pâles de l’hélicoptère. Va-t-il pouvoir venir par ce brouillard ? Va-t-il nous voir ? Ai-je été assez précis sur le lieu de l’accident lorsque j’ai donné l’alerte ? Est-il gravement blessé ? Combien de temps va-t-il tenir ? Combien de temps encore avant la nuit ? Les questions fusent, tournent dans nos têtes, il faut garder notre sang froid. Soudain après seulement 15 minutes un claquement dans l’air annonce l’arrivée des secours, pas de doutes il s’agit d’un hélicoptère. Nous faisons le signe d’alerte, nous sortons nos frontales dans l’espoir de transpercer les nappes de brouillard, nous voyons l’hélicoptère, mais lui ne nous voit pas. Plusieurs rotations au-dessus de nos têtes à quelques dizaines de mètre à peine, puis l’hélicoptère disparait de l’autre coté de la pyramide. La montagne redevient silencieuse et angoissante. Ai-je été assez clair dans mon alerte ? Vers 18h15, je rappelle le 112. J’explique que nous sommes au pied des rappels de l’arête est de la pyramide, coté Torino, entre la pyramide et la pointe Adolphe Rey (plus précis que lors de mon premier appel). L’information est transmise, en quelques minutes le bruit de l’hélicoptère se fait à nouveau plus présent, il n’est pas loin, mais le brouillard nous empêche désormais de le voir. Les minutes continuent de s’écouler, je me sens inutile et fait part à mes compagnons mais aussi à la malheureuse cordée des Lituaniens que si tôt les secours arrivés nous allons partir, j’ai à ce moment là le sentiment que nous sommes de trop et qu’il faut laisser la place aux secouristes… Mes compagnons pensent qu’il faut rester au contraire. Quoi qu’il en soit pour le moment nous essayons d’être les plus visibles possible, l’hélicoptère continu de tourner au-dessus de nos têtes, il n’est pas loin, mais toujours pas visible. Puis dans une manœuvre certainement risquée, le pilote descend très bas sur le glacier, nous le voyons désormais sous la couche de brouillard. Il est environ 100m en dessous de nous. Le pilote commence alors à remonter la pente du glacier, dans notre direction en longeant la paroi au-dessus de la rimaye. La remontée est lente, nous continuons nos signes (le fameux Y d’alerte), avec nos frontales allumées en rouge. L’hélicoptère se rapproche, il est maintenant à quelques dizaines de mètres de nous. Je semble distinguer comme un flash sur le feu du nez de la machine, je crois alors que le pilote nous a enfin vus… Nous apprendrons plus tard que ce n’était pas le cas. L’hélicoptère repart, le doute et l’angoisse se réinstallent pour quelques minutes… Puis il revient, plus près cette fois, à une vingtaine de mètre à peine de nous, les pales sont très proches de la glace, je suis terrorisé à l’idée que l’une d’elle puisse ne serait-ce qu’effleurer la roche ou la glace, ce serait alors une catastrophe… Nous sentons le souffle puissant, deux secouristes sont prêts à descendre. La machine s’approche encore, de là ou je suis j’ai l’impression que les palles ne sont plus qu’à quelques dizaines de centimètres de la pente de glace, je suis terrorisé, je pense aux risques énormes que les secouristes sont entrain de prendre. L’hélicoptère, certainement secoué par l’effet de sol chaotique renvoyé par le glacier crevassé rentre en oscillation, la vision est de plus en plus insupportable. Les deux secouristes sautent et prennent alors pied sur le glacier. L’hélicoptère remonte et s’éloigne du danger, soulagement général. En quelques secondes les deux secouristes nous rejoignent et font le point de la situation. Les allemands seront chargés d’aider l’un des deux secouristes à descendre dans la crevasse, notre cordée servira d’interprète, et nous organisons et sécurisons la vire sous les ordres des secouristes. Un relais est installé, nous mettons de coté les sacs et le matériel, la troisième alpiniste nous rejoint et nous tentons de la rassurer et de lui parler, nous comprenons que c’est son petit ami qui est au fond de la crevasse. Pendant ce temps, les deux secouristes remontent le rescapé de la chute qui gravi lui-même les rochers desquels il a chuté, assuré depuis le relais par l’un des deux secouristes. Il nous rejoint sur la plateforme, nous sortons de son sac une doudoune et une paire de gants, et tentons de le réchauffer et de le rassurer du mieux que nous pouvons… Il nous explique que c’est sa faute, que c’est lui qui a précipité sa chute et celle de son compagnon. Nos quelques gestes amicaux et paroles ne parviennent pas à atténuer son regard perdu. Nous l’examinons à la demande du chef des secouristes, il semble n’avoir aucune blessure grave. Pendant ce temps, un des deux secouristes est en route vers le bas de la crevasse, il atteint le malheureux alpiniste environ 40 à 50m sous le relais. Il est en vie, mais coincé entre la roche et la glace, il souffre terriblement. Probablement une fracture du fémur, les minutes comptent si l’artère fémorale est touchée. Le plan des secouristes est alors de faire descendre un médecin pour lui administrer une dose de morphine et ainsi faciliter le « treuillage ». Du renfort est demandé, l’hélicoptère dépose deux secouristes de plus et un médecin sur le plat au pied de glacier. Nous recevons alors l’ordre d’aller les chercher et de les aider à monter le matériel, Robin et moi nous encordons rapidement, William reste au relais avec les Lituaniens. Après la traversée de la zone de crevasses au pied de la paroi, nous croisons un 3ème secouriste qui nous demande d’aider le 4ème à remonter la lourde barquette chargée de matériel. Commence alors de pénibles minutes d’efforts, nous tirons la barquette à 3, la progression se fait mètres par mètres. Puis le 3ème secouriste revient vers nous en renfort, il décharge la barquette qui contenait un énorme sac de matériel. Nous comprendrons plus tard qu’il s’agissait d’un treuil vraisemblablement électrique. La barquette ainsi allégée, les deux secouristes nous laissent le soin de continuer le hissage de la barquette seuls Robin et moi. Nous changeons nos encordements de manière à faire glisser la barquette en contrebas car nous devons désormais grimper le glacier en traversée. La médecin suit, elle est encordée 30m plus bas à la barquette. Quelques minutes d’effort nous fait atteindre un replat sur le glacier avant la zone crevassée, nous sommes à quelques dizaines de mètres de la paroi, nous laissons la barquette ici.
Nous remontons ensuite Robin et moi vers la plateforme pendant que les secouristes installent le treuil. Nous apprenons alors la terrible nouvelle : il ne sera pas sauvé à temps. Je contiens mes larmes et mes nausées. Nous tentons de rester les moins expressifs possibles car nous ne devons pas le dire à ses compagnons de cordée. Nous sommes alors chargés d’évacuer les deux rescapés, d’abord le blessé, je le déleste de son sac puis l’encorde à moi, William contre-assure notre descente, Robin nous aide à franchir les passages difficiles et nous contre assure lui aussi sur une broche à glace. Je ramène ainsi le malheureux sur la plateforme de la barquette auprès de la médecin et d’un secouriste. Puis il est hélitreuillé, pas le temps de lui défaire le nœud de notre corde qui est aussitôt coupée par le secouriste. Je remonte alors, pour aller chercher la compagne du défunt. Les secouristes nous demandent de faire vite et d’essayer de la distraire pendant que le treuillage du corps commence. Je la rejoins au relais, et la même manœuvre se répète, prendre son sac, l’encorder, l’aider à descendre et passer la zone de crevasses. Tout au long de la descente, j’essaye de garder son attention, je lui parle, je lui montre où mettre les pieds, je lui dis que c’est bien, qu’il faut continuer, qu’il faut rester concentrés sur la marche, j’enfouis au fond de moi la terrible nouvelle.
Nous rejoignons la médecin qui prend le relais, elle lui parle, et tente de faire diversion le plus longtemps possible. Je me remets en route vers le relais pour rejoindre William et Robin. Soudain les cris de la jeune femme ne font alors plus aucun doute, elle sait. Elle sait que l’être aimé s’en est allé, que sa vie s’est arrêtée ici au pied de la pyramide du Tacul. Je rejoins Robin dans la montée, les minutes semblent des heures, l’atmosphère est terriblement triste. Le brouillard toujours là, la pénombre de la fin d’après-midi, les cris… je contiens mes larmes, ne pas craquer. L’hélicoptère revient, elle est hélitreuillée à son tour. Le silence revient, glaçant. Le corps est remonté et sorti de la crevasse, il est là, quelques mètres en dessous de nous, à côté du treuil, des secouristes et d’un des membres de la cordée Allemande. La pénombre du soir qui tombe et le brouillard rajoutent encore au coté effroyable de la scène qui se déroule sous nos yeux humides.
Le dernier secouriste et William font alors le ménage, récupèrent le matériel des relais, il est temps pour nous de partir, la nuit tombe et nous avons encore 1h de marche au milieu des crevasses pour rejoindre notre bivouac. Après la traversée des crevasses en bordure du glacier, une fois en sécurité sur une zone moins tourmentée, le secouriste se désencorde et nous libère, il ne nous reste plus qu’à marcher le plus vite possible, pour passer une deuxième zone crevassée du glacier du Géant avant la nuit. L’hélicoptère revient, le corps du malheureux défunt s’envole dans le ciel. La nuit tombe, le brouillard persiste, l’ambiance est lourde mais nous n’avons pas le temps de nous lamenter, il faut avancer. La cordée des Allemands se met en route derrière nous, on se met d’accord pour passer la zone crevassée ensemble, à 5 nous serons plus à même de remonter quelqu’un d’une crevasse…
Nous traversons tout d’abord une zone facile, aux crevasses bien bouchées, le jeu est de retrouver dans le brouillard la trace empruntée plus tôt à la descente. La visibilité est suffisante, à l’approche de la zone la plus tourmentée j’ai le sentiment que nous sommes en bonne voie. Nous continuons et atteignons la grosse crevasse que nous avions franchi à l’aller, premier soulagement, jusqu’ici nous sommes sur le bon chemin. Nous attendons la cordée des Allemands derrière nous, nous faisons très attention en franchissant le frêle pont de neige qui enjambe le trou béant. L’obscurité se renforce, le brouillard toujours présent, je me souviens qu’ici, deux ans en arrière j’étais justement passé au travers d’un de ces ponts de neige, peut être même exactement au même endroit ? Un frisson me traverse… Quelques manœuvres de cordes, et voilà le plus gros danger derrière nous. Reste maintenant à suivre la trace qui remonte au refuge Torino et trouver la bifurcation qui nous mènera à la combe Maudite ou nous avons planté notre tente quelques heures plus tôt. La visibilité n’excède pas 20/30m, mais pourquoi n’avons-nous pas noté la position de la tente sur le GPS ? Peut-être devrions-nous continuer vers le refuge ? Les questions fusent dans ma tête, la nuit tombe, je me rassure en me disant que tant que nous sommes sur la trace nous ne sommes pas perdus dans l’immensité blanche et sans repères qu’est le glacier du Géant par temps de brouillard. Nous continuons dans un rythme effréné, je suis surpris d’être autant en forme physiquement, je ne suis pas essoufflé, je ne ressens pas de fatigue musculaire, c’est pourtant notre premier jour en altitude, et je n’ai rien bu ni mangé depuis plus de 5h. L’adrénaline ? Le pouvoir du cerveau suite au choc ? Robin et William semblent aussi en forme, mais nous devons régulièrement attendre la cordée des Allemands pour ne pas les perdre de vue dans le brouillard. Je suis attentif à l’inclinaison et à la direction de la pente, seuls repères possibles. La pente se raidi face à moi, nous devons être dans la remontée vers Torino, il faut entamer la montée jusqu’au deux tiers et trouver la bifurcation à droite. Je compte les petites crevasses que nous avions franchi à l’aller, entre 5 et 8 peut être ? J’espère que ma mémoire est bonne. Puis par chance une petite éclaircie nous permet d’entrevoir la trace qui part à droite vers la combe Maudite. Nous nous arrêtons une dernière fois pour saluer la cordée des Allemands qui va poursuivre sa route vers la chaleur du refuge Torino.
Nous nous remettons en route, il fait maintenant très sombre et le brouillard est revenu. Nous allumons nos frontales. La trace que je suis n’est pas très marquée mais va dans la bonne direction, puis au bout de quelques minutes nous retrouvons une trace bien plus marquée, deuxième soulagement, nous sommes sur la bonne route. Nous continuons alors en comptant les crevasses, Robin se souvient que nous en avions passé quelques-unes avant de planter la tente, il faut rester patients, garder la trace et compter… Nous lançons régulièrement les faisceaux de nos frontales sur le côté droit pour espérer entrevoir notre minuscule tente dans le brouillard et l’obscurité, nous songeons un instant à nous mettre en ligne, l’un resterait sur la trace, les autres en contrebas sur le coté droit ou est censé se trouver notre bivouac. Mais nous n’aurons pas besoin de le faire, à mesure que nous montons la visibilité s’améliore, et soudain, à 50m environ devant moi je distingue une ombre noire. Je ne dis rien au début, je ne suis pas sûr, je continue d’avancer, je suis surpris car je distingue cette ombre bien mieux à l’œil nu qu’avec la frontale, la toile étant pourtant orange fluo… Puis après quelques dizaines de mètres, plus de doutes, l’ombre a vraiment la forme d’une tente, nous nous dirigeons vers elle, nous étions sur la bonne trace ! Soulagement général ! Quel bonheur de trouver cette petite toile tendue au milieu de l’immense combe Maudite…
Il est 22h passé, Robin nous prépare une soupe délicieuse agrémentée de riz préalablement cuit. Le brouillard s’estompe en quelques minutes à peine pendant que nous nous installons. La vue est splendide, le calme passe d’oppressant à tranquillisant. Nous repensons au tragique après midi que nous venons de vivre et décidons que nous n’irons pas grimper demain. Nous prévenons Alice et Guillaume restés au refuge et avec qui nous avions rendez-vous à 6h le lendemain sur le glacier pour aller faire la voie dans la pyramide. La nuit s’installe, le froid est mordant, nous nous serrons au fond de nos duvet dans la petite tente. Mais pourquoi n’ai-je pas pris mon gros duvet d’hiver ? Je dors tout habillé, avec tous mes vêtements disponibles, je compte 7 couches pour me séparer de l’air glacial : vêtements, drap, duvet et sur-sac compris… La nuit sera difficile, mais finalement plus à cause des images de la journée qui reviennent sans cesse que par le froid. Comment penser à autre chose ? Cette question reviendra toute la nuit…
Vers 6h du matin le réveil sonne, nous apercevons au loin Alice et Guillaume qui se sont rendus au point de rendez-vous comme prévu, ils n’ont probablement pas eu nos messages… Nous nous levons donc rapidement pour ne pas les faire trop attendre dans le froid qui est glacial en ce mercredi matin. Un fois réunis, nous leur expliquons le drame, la journée se transforme donc en balade glaciaire dans la combe Maudite le matin et exercices de secours en crevasse sous le refuge de Torino l’après-midi. Ce sera bien suffisant pour tenter de réapprécier en douceur la beauté de la montagne. Un épisode douloureux dans nos parcours de montagnards vient de nous marquer à vie.
Voici presque deux ans que je n’avais pas écrit ici sur mon blog. J’avais pourtant essayé, j’ai de multiples (mauvais) brouillons sur mes dernières ascensions déroulées sans encombres et en parfaites conditions : Argentière, Le Tour, Bionnasay, le Vignemale, Miage, l’Estanyol, 2 Mont Blanc, les Droites, (entre autres) mais rien ne sortait… Je suis le premier à me plaindre et trouver injuste que l’on ne parle d’alpinisme et d’escalade dans les médias que lorsqu’il y’a un accident. C’est pourtant exactement ce que je viens de faire. Peut-être une manière pour moi d’évacuer, d’atténuer le drame en partageant ? Probablement. Est-ce le cas pour les médias qui ne relatent que les évènements négatifs ? Est-ce une manière pour la société entière de mieux supporter les catastrophes auxquelles nous sommes confrontés quotidiennement en partageant, en parlant ? Je n’ai pas la réponse, mais cela change un peu ma vision que j’en avais jusqu’à présent, ne voir que le verre à moitié vide est dommage, angoissant, les médias sont anxiogènes, mais peut-être est-ce nécessaire collectivement ?
Nous voici maintenant stoppés sur le glacier mes compagnons et moi, alors que nous venions simplement reconnaitre l’approche en préparation de l’ascension du lendemain. Nos corps trésaillent de l’horreur de la scène. Les cris de la troisième alpiniste de la cordée transpercent le brouillard qui recouvre par nappes intermittentes la montagne silencieuse. Comme un réflexe, je saisi mon téléphone dans ma poche, il y’a du réseau, je compose le 112 et explique la scène au PGHM de Chamonix. Je crie en anglais que je viens d’appeler les secours, et tente de rassurer la troisième alpiniste restée seule sur la vire. Nous nous remettons en route vers le pied de la voie, là ou nous nous trouvons nous sommes exposés aux chutes de séracs, il ne faut donc pas trainer. Nous cheminons dans une zone crevassée au pied de la parois avant la rimaye, j’aperçois un des deux alpinistes qui vient de tomber, il semble avoir été chanceux dans sa chute, il est environ 20m en contrebas sur une partie plate du glacier, un rebond sur la paroi l’aura certainement précipité là au-delà de la rimaye. Aucune nouvelle de son compagnon en revanche, de là ou nous somme nous ne voyons qu’une rimaye bien sombre et bien profonde. Le rescapé et sa compagne de cordée restée sur la vire tentent de l’appeler, la cordée suivante en termine des rappels et installe un relais sur la vire, essayons d’éviter les sur accidents… J’atteins enfin le pied de la paroi après quelques manœuvres périlleuses pour désescalader le bloc de glace bouchant la rimaye et donnant accès à la vire dans la paroi. Je fais monter mes compagnons de cordée en les assurant sur une écaille douteuse, les coinceurs et friends sont restés au bivouac...
Nous voici maintenant en sécurité ici protégés des chutes de séracs. Nous discutons en anglais avec l’alpiniste qui est restée sur la vire, nous tentons de comprendre si elle et son compagnon de cordée chanceux arrivent à communiquer avec le 3ème vraisemblablement tombé très bas dans la rimaye, 30m, 40m de chute peut être ? Puis commence alors la longue attente, nos oreilles sont à l’affut du bruit des pâles de l’hélicoptère. Va-t-il pouvoir venir par ce brouillard ? Va-t-il nous voir ? Ai-je été assez précis sur le lieu de l’accident lorsque j’ai donné l’alerte ? Est-il gravement blessé ? Combien de temps va-t-il tenir ? Combien de temps encore avant la nuit ? Les questions fusent, tournent dans nos têtes, il faut garder notre sang froid. Soudain après seulement 15 minutes un claquement dans l’air annonce l’arrivée des secours, pas de doutes il s’agit d’un hélicoptère. Nous faisons le signe d’alerte, nous sortons nos frontales dans l’espoir de transpercer les nappes de brouillard, nous voyons l’hélicoptère, mais lui ne nous voit pas. Plusieurs rotations au-dessus de nos têtes à quelques dizaines de mètre à peine, puis l’hélicoptère disparait de l’autre coté de la pyramide. La montagne redevient silencieuse et angoissante. Ai-je été assez clair dans mon alerte ? Vers 18h15, je rappelle le 112. J’explique que nous sommes au pied des rappels de l’arête est de la pyramide, coté Torino, entre la pyramide et la pointe Adolphe Rey (plus précis que lors de mon premier appel). L’information est transmise, en quelques minutes le bruit de l’hélicoptère se fait à nouveau plus présent, il n’est pas loin, mais le brouillard nous empêche désormais de le voir. Les minutes continuent de s’écouler, je me sens inutile et fait part à mes compagnons mais aussi à la malheureuse cordée des Lituaniens que si tôt les secours arrivés nous allons partir, j’ai à ce moment là le sentiment que nous sommes de trop et qu’il faut laisser la place aux secouristes… Mes compagnons pensent qu’il faut rester au contraire. Quoi qu’il en soit pour le moment nous essayons d’être les plus visibles possible, l’hélicoptère continu de tourner au-dessus de nos têtes, il n’est pas loin, mais toujours pas visible. Puis dans une manœuvre certainement risquée, le pilote descend très bas sur le glacier, nous le voyons désormais sous la couche de brouillard. Il est environ 100m en dessous de nous. Le pilote commence alors à remonter la pente du glacier, dans notre direction en longeant la paroi au-dessus de la rimaye. La remontée est lente, nous continuons nos signes (le fameux Y d’alerte), avec nos frontales allumées en rouge. L’hélicoptère se rapproche, il est maintenant à quelques dizaines de mètres de nous. Je semble distinguer comme un flash sur le feu du nez de la machine, je crois alors que le pilote nous a enfin vus… Nous apprendrons plus tard que ce n’était pas le cas. L’hélicoptère repart, le doute et l’angoisse se réinstallent pour quelques minutes… Puis il revient, plus près cette fois, à une vingtaine de mètre à peine de nous, les pales sont très proches de la glace, je suis terrorisé à l’idée que l’une d’elle puisse ne serait-ce qu’effleurer la roche ou la glace, ce serait alors une catastrophe… Nous sentons le souffle puissant, deux secouristes sont prêts à descendre. La machine s’approche encore, de là ou je suis j’ai l’impression que les palles ne sont plus qu’à quelques dizaines de centimètres de la pente de glace, je suis terrorisé, je pense aux risques énormes que les secouristes sont entrain de prendre. L’hélicoptère, certainement secoué par l’effet de sol chaotique renvoyé par le glacier crevassé rentre en oscillation, la vision est de plus en plus insupportable. Les deux secouristes sautent et prennent alors pied sur le glacier. L’hélicoptère remonte et s’éloigne du danger, soulagement général. En quelques secondes les deux secouristes nous rejoignent et font le point de la situation. Les allemands seront chargés d’aider l’un des deux secouristes à descendre dans la crevasse, notre cordée servira d’interprète, et nous organisons et sécurisons la vire sous les ordres des secouristes. Un relais est installé, nous mettons de coté les sacs et le matériel, la troisième alpiniste nous rejoint et nous tentons de la rassurer et de lui parler, nous comprenons que c’est son petit ami qui est au fond de la crevasse. Pendant ce temps, les deux secouristes remontent le rescapé de la chute qui gravi lui-même les rochers desquels il a chuté, assuré depuis le relais par l’un des deux secouristes. Il nous rejoint sur la plateforme, nous sortons de son sac une doudoune et une paire de gants, et tentons de le réchauffer et de le rassurer du mieux que nous pouvons… Il nous explique que c’est sa faute, que c’est lui qui a précipité sa chute et celle de son compagnon. Nos quelques gestes amicaux et paroles ne parviennent pas à atténuer son regard perdu. Nous l’examinons à la demande du chef des secouristes, il semble n’avoir aucune blessure grave. Pendant ce temps, un des deux secouristes est en route vers le bas de la crevasse, il atteint le malheureux alpiniste environ 40 à 50m sous le relais. Il est en vie, mais coincé entre la roche et la glace, il souffre terriblement. Probablement une fracture du fémur, les minutes comptent si l’artère fémorale est touchée. Le plan des secouristes est alors de faire descendre un médecin pour lui administrer une dose de morphine et ainsi faciliter le « treuillage ». Du renfort est demandé, l’hélicoptère dépose deux secouristes de plus et un médecin sur le plat au pied de glacier. Nous recevons alors l’ordre d’aller les chercher et de les aider à monter le matériel, Robin et moi nous encordons rapidement, William reste au relais avec les Lituaniens. Après la traversée de la zone de crevasses au pied de la paroi, nous croisons un 3ème secouriste qui nous demande d’aider le 4ème à remonter la lourde barquette chargée de matériel. Commence alors de pénibles minutes d’efforts, nous tirons la barquette à 3, la progression se fait mètres par mètres. Puis le 3ème secouriste revient vers nous en renfort, il décharge la barquette qui contenait un énorme sac de matériel. Nous comprendrons plus tard qu’il s’agissait d’un treuil vraisemblablement électrique. La barquette ainsi allégée, les deux secouristes nous laissent le soin de continuer le hissage de la barquette seuls Robin et moi. Nous changeons nos encordements de manière à faire glisser la barquette en contrebas car nous devons désormais grimper le glacier en traversée. La médecin suit, elle est encordée 30m plus bas à la barquette. Quelques minutes d’effort nous fait atteindre un replat sur le glacier avant la zone crevassée, nous sommes à quelques dizaines de mètres de la paroi, nous laissons la barquette ici.
Nous remontons ensuite Robin et moi vers la plateforme pendant que les secouristes installent le treuil. Nous apprenons alors la terrible nouvelle : il ne sera pas sauvé à temps. Je contiens mes larmes et mes nausées. Nous tentons de rester les moins expressifs possibles car nous ne devons pas le dire à ses compagnons de cordée. Nous sommes alors chargés d’évacuer les deux rescapés, d’abord le blessé, je le déleste de son sac puis l’encorde à moi, William contre-assure notre descente, Robin nous aide à franchir les passages difficiles et nous contre assure lui aussi sur une broche à glace. Je ramène ainsi le malheureux sur la plateforme de la barquette auprès de la médecin et d’un secouriste. Puis il est hélitreuillé, pas le temps de lui défaire le nœud de notre corde qui est aussitôt coupée par le secouriste. Je remonte alors, pour aller chercher la compagne du défunt. Les secouristes nous demandent de faire vite et d’essayer de la distraire pendant que le treuillage du corps commence. Je la rejoins au relais, et la même manœuvre se répète, prendre son sac, l’encorder, l’aider à descendre et passer la zone de crevasses. Tout au long de la descente, j’essaye de garder son attention, je lui parle, je lui montre où mettre les pieds, je lui dis que c’est bien, qu’il faut continuer, qu’il faut rester concentrés sur la marche, j’enfouis au fond de moi la terrible nouvelle.
Nous rejoignons la médecin qui prend le relais, elle lui parle, et tente de faire diversion le plus longtemps possible. Je me remets en route vers le relais pour rejoindre William et Robin. Soudain les cris de la jeune femme ne font alors plus aucun doute, elle sait. Elle sait que l’être aimé s’en est allé, que sa vie s’est arrêtée ici au pied de la pyramide du Tacul. Je rejoins Robin dans la montée, les minutes semblent des heures, l’atmosphère est terriblement triste. Le brouillard toujours là, la pénombre de la fin d’après-midi, les cris… je contiens mes larmes, ne pas craquer. L’hélicoptère revient, elle est hélitreuillée à son tour. Le silence revient, glaçant. Le corps est remonté et sorti de la crevasse, il est là, quelques mètres en dessous de nous, à côté du treuil, des secouristes et d’un des membres de la cordée Allemande. La pénombre du soir qui tombe et le brouillard rajoutent encore au coté effroyable de la scène qui se déroule sous nos yeux humides.
Le dernier secouriste et William font alors le ménage, récupèrent le matériel des relais, il est temps pour nous de partir, la nuit tombe et nous avons encore 1h de marche au milieu des crevasses pour rejoindre notre bivouac. Après la traversée des crevasses en bordure du glacier, une fois en sécurité sur une zone moins tourmentée, le secouriste se désencorde et nous libère, il ne nous reste plus qu’à marcher le plus vite possible, pour passer une deuxième zone crevassée du glacier du Géant avant la nuit. L’hélicoptère revient, le corps du malheureux défunt s’envole dans le ciel. La nuit tombe, le brouillard persiste, l’ambiance est lourde mais nous n’avons pas le temps de nous lamenter, il faut avancer. La cordée des Allemands se met en route derrière nous, on se met d’accord pour passer la zone crevassée ensemble, à 5 nous serons plus à même de remonter quelqu’un d’une crevasse…
Nous traversons tout d’abord une zone facile, aux crevasses bien bouchées, le jeu est de retrouver dans le brouillard la trace empruntée plus tôt à la descente. La visibilité est suffisante, à l’approche de la zone la plus tourmentée j’ai le sentiment que nous sommes en bonne voie. Nous continuons et atteignons la grosse crevasse que nous avions franchi à l’aller, premier soulagement, jusqu’ici nous sommes sur le bon chemin. Nous attendons la cordée des Allemands derrière nous, nous faisons très attention en franchissant le frêle pont de neige qui enjambe le trou béant. L’obscurité se renforce, le brouillard toujours présent, je me souviens qu’ici, deux ans en arrière j’étais justement passé au travers d’un de ces ponts de neige, peut être même exactement au même endroit ? Un frisson me traverse… Quelques manœuvres de cordes, et voilà le plus gros danger derrière nous. Reste maintenant à suivre la trace qui remonte au refuge Torino et trouver la bifurcation qui nous mènera à la combe Maudite ou nous avons planté notre tente quelques heures plus tôt. La visibilité n’excède pas 20/30m, mais pourquoi n’avons-nous pas noté la position de la tente sur le GPS ? Peut-être devrions-nous continuer vers le refuge ? Les questions fusent dans ma tête, la nuit tombe, je me rassure en me disant que tant que nous sommes sur la trace nous ne sommes pas perdus dans l’immensité blanche et sans repères qu’est le glacier du Géant par temps de brouillard. Nous continuons dans un rythme effréné, je suis surpris d’être autant en forme physiquement, je ne suis pas essoufflé, je ne ressens pas de fatigue musculaire, c’est pourtant notre premier jour en altitude, et je n’ai rien bu ni mangé depuis plus de 5h. L’adrénaline ? Le pouvoir du cerveau suite au choc ? Robin et William semblent aussi en forme, mais nous devons régulièrement attendre la cordée des Allemands pour ne pas les perdre de vue dans le brouillard. Je suis attentif à l’inclinaison et à la direction de la pente, seuls repères possibles. La pente se raidi face à moi, nous devons être dans la remontée vers Torino, il faut entamer la montée jusqu’au deux tiers et trouver la bifurcation à droite. Je compte les petites crevasses que nous avions franchi à l’aller, entre 5 et 8 peut être ? J’espère que ma mémoire est bonne. Puis par chance une petite éclaircie nous permet d’entrevoir la trace qui part à droite vers la combe Maudite. Nous nous arrêtons une dernière fois pour saluer la cordée des Allemands qui va poursuivre sa route vers la chaleur du refuge Torino.
Nous nous remettons en route, il fait maintenant très sombre et le brouillard est revenu. Nous allumons nos frontales. La trace que je suis n’est pas très marquée mais va dans la bonne direction, puis au bout de quelques minutes nous retrouvons une trace bien plus marquée, deuxième soulagement, nous sommes sur la bonne route. Nous continuons alors en comptant les crevasses, Robin se souvient que nous en avions passé quelques-unes avant de planter la tente, il faut rester patients, garder la trace et compter… Nous lançons régulièrement les faisceaux de nos frontales sur le côté droit pour espérer entrevoir notre minuscule tente dans le brouillard et l’obscurité, nous songeons un instant à nous mettre en ligne, l’un resterait sur la trace, les autres en contrebas sur le coté droit ou est censé se trouver notre bivouac. Mais nous n’aurons pas besoin de le faire, à mesure que nous montons la visibilité s’améliore, et soudain, à 50m environ devant moi je distingue une ombre noire. Je ne dis rien au début, je ne suis pas sûr, je continue d’avancer, je suis surpris car je distingue cette ombre bien mieux à l’œil nu qu’avec la frontale, la toile étant pourtant orange fluo… Puis après quelques dizaines de mètres, plus de doutes, l’ombre a vraiment la forme d’une tente, nous nous dirigeons vers elle, nous étions sur la bonne trace ! Soulagement général ! Quel bonheur de trouver cette petite toile tendue au milieu de l’immense combe Maudite…
Il est 22h passé, Robin nous prépare une soupe délicieuse agrémentée de riz préalablement cuit. Le brouillard s’estompe en quelques minutes à peine pendant que nous nous installons. La vue est splendide, le calme passe d’oppressant à tranquillisant. Nous repensons au tragique après midi que nous venons de vivre et décidons que nous n’irons pas grimper demain. Nous prévenons Alice et Guillaume restés au refuge et avec qui nous avions rendez-vous à 6h le lendemain sur le glacier pour aller faire la voie dans la pyramide. La nuit s’installe, le froid est mordant, nous nous serrons au fond de nos duvet dans la petite tente. Mais pourquoi n’ai-je pas pris mon gros duvet d’hiver ? Je dors tout habillé, avec tous mes vêtements disponibles, je compte 7 couches pour me séparer de l’air glacial : vêtements, drap, duvet et sur-sac compris… La nuit sera difficile, mais finalement plus à cause des images de la journée qui reviennent sans cesse que par le froid. Comment penser à autre chose ? Cette question reviendra toute la nuit…
Vers 6h du matin le réveil sonne, nous apercevons au loin Alice et Guillaume qui se sont rendus au point de rendez-vous comme prévu, ils n’ont probablement pas eu nos messages… Nous nous levons donc rapidement pour ne pas les faire trop attendre dans le froid qui est glacial en ce mercredi matin. Un fois réunis, nous leur expliquons le drame, la journée se transforme donc en balade glaciaire dans la combe Maudite le matin et exercices de secours en crevasse sous le refuge de Torino l’après-midi. Ce sera bien suffisant pour tenter de réapprécier en douceur la beauté de la montagne. Un épisode douloureux dans nos parcours de montagnards vient de nous marquer à vie.
Voici presque deux ans que je n’avais pas écrit ici sur mon blog. J’avais pourtant essayé, j’ai de multiples (mauvais) brouillons sur mes dernières ascensions déroulées sans encombres et en parfaites conditions : Argentière, Le Tour, Bionnasay, le Vignemale, Miage, l’Estanyol, 2 Mont Blanc, les Droites, (entre autres) mais rien ne sortait… Je suis le premier à me plaindre et trouver injuste que l’on ne parle d’alpinisme et d’escalade dans les médias que lorsqu’il y’a un accident. C’est pourtant exactement ce que je viens de faire. Peut-être une manière pour moi d’évacuer, d’atténuer le drame en partageant ? Probablement. Est-ce le cas pour les médias qui ne relatent que les évènements négatifs ? Est-ce une manière pour la société entière de mieux supporter les catastrophes auxquelles nous sommes confrontés quotidiennement en partageant, en parlant ? Je n’ai pas la réponse, mais cela change un peu ma vision que j’en avais jusqu’à présent, ne voir que le verre à moitié vide est dommage, angoissant, les médias sont anxiogènes, mais peut-être est-ce nécessaire collectivement ?