Après de multiples tergiversations vendredi et même une soirée bières/déprime post consultations des différents bulletins météo du weekend, nous décidons tout de même samedi de partir pour le massif du Néouvielle en pariant sur une possible fenêtre météo dimanche. Même équipe qu’il y’a 3 semaines au Petit Vignemale : Isa, Rémi, Simon et moi. La pluie fait son apparition dès l’autoroute et notre entrée en vallée d’Aure, sous un temps carrément maussade, nous laisse quelque peu sceptiques quand à cette fameuse fenêtre… On continue tout de même, tant qu’on est dans la voiture on est au sec ! Arrivés au « bunker » du lac de Cap de Long, la pluie cesse pour laisser place à un épais brouillard empêchant tout reconnaissance visuelle de la voie envisagée le lendemain : Immortela (TD+) dans la face sud du Néouvielle. On profite néanmoins de l’abri évitant tout montage de tente et repas dans l’humidité et la fraicheur ambiante… Au menu cassoulet, tarte, ratatouille et bières ! Faut pas se laisser abattre non plus ! Levé 6h dimanche matin, si tôt habillés nous sortons constater avec joie que le ciel est empli d’étoiles ! Grand beau au programme ! Mais froid : 4 petits degrés au moi d’aout ça réveille! Déjà nous contemplons la face sud du Néouvielle depuis notre abri tout en prenant notre petit déjeuner. Premier constat, pas de neige au pied de la face, piolets et crampons resteront dans la voiture. Vers 7h nous nous mettons en route pour les 2h de marche d’approche, petite pause vers le « Pas du Gat » ou nous laisserons un sac à dos par cordée, pour être les plus légers possibles dans la voie, puis vers 8h30 nous gagnons le pied du feu glacier sud du Néouvielle et constatons que l’endroit est déjà occupé par de nombreuses cordées… Au moins dix personnes dans l’arête Ferbos, certainement autant dans l’arête des 3 Conseillers, et…. au moins deux cordées devant nous pour Immortela ! Vers 9h nous atteignons le pied de la voie, le verdict est confirmé, 2 cordées de 3 devant nous dont la première qui n’a pas l’air bien réveillée dans la première longueur… La journée promet d’être longue….très longue. Tant pis, nous n’avons pas de plan B et nous sommes bien décidés à y’aller, après tous ces efforts : soirée bière vendredi, route sous la pluie et cassoulet le samedi on ne va pas rentrer à Toulouse bredouilles ! Une heure après environ, la deuxième cordée nous précédant en termine avec la première longueur (5+), à notre tour de nous y lancer, Simon part devant, premier constat le rocher est froid et humide, nous croisons même ça et là quelques cristaux de glace dans les rhododendrons… je le rejoins au premier relais suivi de près par Isa. Je repars ensuite dans la deuxième longueur (6a) ou nous avons eu le privilège d’apprécier la technique de nos prédécesseurs depuis en bas pendant qu’on attendait. Un petit ressaut avait alors offert quelques difficultés à l’une des membres de la cordée qui avait partagé ses émotions avec toute la montagne… Un peu comme à Roland Garros mais dans le jargon du grimpeur : « prend moi sec ! » ou encore « sec sur la corde rose ! » et autre cris stridents. De quoi me mettre le mental dans les chaussettes, n’aimant pas vraiment voir quelqu’un en difficulté dans un passage que je vais devoir faire en tête à mon tour. Bref les atermoiements de Paola dans la tête (oui elle s’appelle Paola mais c’est tout ce que nous savons d’elle), je m’élance, au début ça va, petite traversée fine mais ça va, puis j’arrive au fameux pas qui avait tant donné d’émotions à notre amie Paola… je vois un spit sous le ressaut et me dit bêtement : « bon ça va au moins c’est protégé, je peux tenter le pas dans la foulée », sans prendre le temps de réfléchir et de me poser un peu…erreur ! Au début je commence le mouvement, puis je monte un peu, atteint une bonne prise de main à droite au dessus du ressaut, ferme le bras droit et là, au moment de monter les pieds…. Pas de pieds ! Mince, je repense à Paola, commence à râler contre moi et après un séchage en règle sur mon bras droit fermé je commence sérieusement à attraper les bouteilles… Simon en excellent compagnon de cordée me conseille calmement de mettre un friend dans la fissure au dessus du ressaut, il me reste encore un peu d’énergie dans le bras droit et je m’exécute, je crois que je n’ai jamais posé un friend aussi vite, je trouve la taille du premier coup le cale au fond de la fissure, passe la corde dedans (sans rallonger) et me suspends dessus… ! Je reste là comme un c… à râler contre moi quelques minutes (je fais profiter toute la montagne à mon tour de quelques effusions grossières). J’ai une fois de plus confondu vitesse et précipitation, j’analyse la situation, récupère des bras, mémorise le mouvement à faire puis repars et passe sans problèmes… Avec le recul j’aurai du dans l’ordre : me poser sous le ressaut, prendre un bon repos, visualiser le mouvement, commencer à monter, mettre le friend pour protéger le pas et ensuite terminer le mouvement et sortir du ressaut… j’ai fait tout ça mais à l’envers. Bref, une petite leçon d’escalade pour commencer la journée ! Le reste de la longueur est plus facile, toujours en traversée et je fais relais au pied d’une superbe dalle sculpté et fermée en haut par un petit toit bien raide : ce sera la 3ème longueur (6a+) que Simon aura la plaisir d’ouvrir, une des plus belles longueurs de la voie ! J’enchaine ensuite avec la 4ème longueur (6a), que je trouve plus difficile que la précédente pourtant coté plus difficile…. Sorte de cheminement dans des bombés un peu en dalle ou il ne faut pas hésiter à louvoyer comme indiqué sur le topo. Viendrons ensuite deux longueurs plus tranquilles en 5+, il est déjà 13h/14h et il reste encore 3 longueurs… Ca bouchonne de nouveau ici, la 7ème longueur étant la plus verticale de la voie nous profitons d’une nouvelle séquence émotion de Paola tout en prenant un petit piquenique au soleil… nous resterons à ce relais environ 1 heure. Une fois la voie à nouveau libre, Simon part pour ce qui sera la plus belle longueur de la voie (6a), un mur lisse vertical barré de fissures de toutes tailles et orientation offrant de très très bonnes prises, à équiper complètement. Je m’y régalerais aussi en second ! Vient ensuite la 8ème et avant dernière longueur qui est censée être la plus difficile (6a+). J’y pars en tête, bien rassuré par les spits en place sur les premiers mètres, puis suivant les conseils de Simon je parviens au premier, puis au second point après quelques mouvements pas faciles… La suite est plus simple, avant d’attaquer à nouveau un mur raide de quelques mètres ou je dois encore puiser dans mes ressources ! Je parviens ensuite à une partie plus couchée et aperçois sur la droite le début de ce que je considère être l’arête sommitale, je ne sais pas trop à ce moment là si je dois y’aller ou si je dois continuer tout droit dans la face. Je n’hésite pas longtemps, la face étant entrecoupée de toits et autre ressauts verticaux, ce sera le bon choix, après quelques mètres je trouve à nouveau des spits puis le relais final encore occupé par la cordée précédente. Simon me rejoint, nous rangeons une des deux cordes, nous ne perdons pas de temps les nuages étant de plus en plus nombreux et c’est en corde tendue que nous parcourons les 100 derniers mètres de la voie sur une arête facile mais dans un rocher parfois douteux, petite frayeur pour moi au passage lorsqu’une petite prise de main me restera dans les doigts entrainant une petite zipette… Le sommet est atteint vers 17h, nous avons explosé l’horaire, normal ayant attendu entre 20 et 30 minutes à chaque relais. Petite photo, petite pause, petite fin de piquenique et nous voici en route pour la longue redescente à la voiture, que nous atteindrons vers 20h, soit 13h après l’avoir quittée. Nous y croiserons brièvement Paola qui à l’air bien remise des ses émotions, quand à nous direction St Lary pour partager un bon petit repas au restaurant ! On repart quand ?